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Frédéric Chris

COMING-FOOT

Dans la peau d’un Asperger

Avant de devenir artiste, l’auteur révolutionnera par ses innovations un milieu du football trivial et homophobe qui s’étiolait dans ses convenances.Cette biographie prouve qu’être « différent » – Asperger dans son cas – est source d’innovation et de détermination sans lesquelles les succès sont sans originalité donc peu progressifs !

Table des matières

Prologue : De CR7 à Kylian Mbappé

Chapitre 01 : Du rêve à la réalité

Chapitre 02 : « Il ne récupérera jamais ses facultés intellectuelles »

Chapitre 03 : « Tu mets le chiffre que tu veux ! »

Chapitre 04 : « Tu as confiance en nous, n’est-ce pas ? »

Chapitre 05 : « Tu n’as pas le choix ! »

Chapitre 06 : « Fou ou Asperger ? » Telle était la question

Chapitre 07 : Un vrai vaudeville

Chapitre 08 : Menacé de mort

Chapitre 09 : « Ils n’en voulaient qu’à ton fric ! »

Chapitre 10 : Résurgence

Chapitre 11 : Le miroir aux alouettes

Chapitre 12 : De la Barbarie au football de talus

Chapitre 13 : Le règne du non-dit

Chapitre 14 : Les canaux de Cruyff

Chapitre 15 : Le football n’est pas un sport de « tarlouzes »

Chapitre 16 : Et pourtant Ben Laden, je ne l’ai jamais rencontré !

Chapitre 17 : De la mine au paradis

Chapitre 18 : Kopa, Di Stefano ou autres poules aux œufs d’or

Chapitre 19 : L’illusion ne résiste pas à l’épreuve

Chapitre 20 : Centre de formation

Chapitre 21 : « Je refuse d’être remplaçant ! »

Chapitre 22 : Mes petits frères

Chapitre 23 : Mise en examen

Chapitre 24 : « C’est logique non ? On est là pour gagner ! »

Chapitre 25 : L’armée est un sport

Chapitre 26 : Le petit « Bosh » m’avait à l’œil

Chapitre 27 : « Il ne faut pas pousser grand-mère dans les orties ! »

Chapitre 28 : Un putsch salvateur

Chapitre 29 : « Gabet » Chapuisat, affrontement d’alter ego opposé !

Chapitre 30 : Qui c’est le meilleur ?

Chapitre 31 : Face à des Hippies, des gamins surmotivés

Chapitre 32 : Rencontre avec le Roi Pelé

Chapitre 33 : On n’est jamais trop jeune pour avoir du talent

Chapitre 34 : « Christian, c’est quoi ce bordel ? »

Chapitre 35 : « Le succès n’est jamais un hasard ! »

Chapitre 36 : Face au « Bad-boy » au sourire d’ange

Chapitre 37 : « Voulez-vous assister à l’opération ? »

Chapitre 38 : « El Mago »

Chapitre 39 : « Ce match, nous le transformerons en 4 contre 4 »

Chapitre 40 : « Trois joueurs estropiés, ça ne suffisait pas ! »

Chapitre 41 : « A-t-on déjà vu un Directeur sportif expulsé ? »

Chapitre 42 : Il s’en va !

Chapitre 43 : Homophobie de vestiaire

Chapitre 44 : La bisexualité est dans la nature de l’homme

Chapitre 45 : « Briser une barrière pour être libre ! »

Chapitre 46 : Lucien Favre me remet le « pied à l’étrier »

Chapitre 47 : Vincent Perez à Saint-Prex, ce n’est pas du cinéma

Chapitre 48 : « Christian, si Lucien signe, il y a 20 000 CHF pour toi ! »

Chapitre 49 : Un « cador » du corps arbitral helvétique mafieux

Chapitre 50 : Mauro Poggia, un ami pour la vie

Chapitre 51 : De Barbara à Mbappé

Chapitre 52 : « Petit détail Maître, c’est pour le Capitanat ? »

Chapitre 53 : « 600 000 CHF entre Nike et Adidas ! »

Chapitre 54 : « C’est bon, maintenant parlons d’argent ! »

Chapitre 55 : Mon chant du cygne

Chapitre 56 : encore fallait-il séparer le « blé de l’ivraie »

Chapitre 57 : Accueilli comme une « Rock star »

Chapitre 58 : « Salut le Toulousain ! »

Chapitre 59 : « Lucien ne sera pas présent à la reprise ! »

Chapitre 60 : « Peut-on envisager un retour au FC Servette ? »

Chapitre 61 : Sacré numéro 10

Chapitre 62 : Lucien, la Suisse et la santé pour ne rien oublier !

Chapitre 63 : Au service de l’homme le plus riche du monde

Chapitre 64 : Du Petrus à l’Opus One

Chapitre 65 : Une rencontre qui ne devait rien au hasard !

Chapitre 66 : L’importance de l’envers du décor

Épilogue« Mbappé et ses potes » face à l’anarchie

Post-scriptum : Mbappé, mon Messie

PROLOGUE

De CR7 à Kylian Mbappé

« Je suis anéanti. Grand admirateur de Cristiano Ronaldo pendant plus de 15 ans, je suis outragé d’apprendre le 1er janvier 2023 que celui qui fut l’une de mes idoles vient d’accepter un contrat pour jouer en Arabie saoudite et surtout devient l’ambassadeur d’un royaume qui bafoue les valeurs démocratiques. Pour moi, c’est un séisme psychologique. CR7 s’écarte donc de sa promesse faite en 2015 de « sortir avec dignité́ » et « ne pas finir aux USA, au Qatar, ou à Dubaï̈ ». Si ce grand champion est complètement libre de changer d’avis et de choisir la destination de son crépuscule sportif, a-t-il conscience de promouvoir un état monarchique réputé pour être l’un des plus répressifs au monde qui décapite ses opposants ?
Pour moi, cela ne me gêne pas qu’une « Star de son calibre » perçoive un salaire astronomique. Ceci fait partie de l’offre et la demande. Même si aujourd’hui toutes les limites sont franchies, un grand champion gagne de l’argent car elle en génère encore plus. Dès lors, qu’elle en profite est parfaitement logique et légitime. En revanche, qu’un footballeur déjà milliardaire avant cette décision et qui se révèle être un influenceur planétaire de premier plan devienne complice d’un état mortifère, cela devient gravissime à mon sens.

Le sport, et notamment le football du fait de sa médiatisation planétaire, constitue indiscutablement un pouvoir politique considérable censé œuvrer pour lutter contre toutes les discriminations. Une obligation qui figure au sommet des statuts de toutes les grandes fédérations internationales. Et pourtant, ces entités tellement puissantes se révèlent si décevantes que nos espoirs et notre salut ne peuvent continuer à reposer entre leurs seules mains. Ne serait-il pas plus efficace que les plus altruistes des richissimes icônes sportives s’unissent et s’emploient à lutter ensemble contre les discriminations. Ces champions de tous bords, encensés par tous sur le plan planétaire, sont actuellement les mieux placés à pouvoir le faire et par la même occasion à donner du sens et de la cohérence à leur rang de « Star ».

Cristiano Ronaldo par son passé et par ce qui semblait être ses valeurs personnelles, était le premier à cocher toutes les cases pour prendre la tête de ce mouvement fédérateur. C’est du moins ce que les plus vulnérables, les discriminés et les désemparés pouvaient espérer. Eh bien non, l’appât du gain, le narcissisme et sans doute de mauvais conseils en ont décidé autrement. C’est triste. Quelle déchéance.

Qui d’autre pour reprendre ce flambeau aujourd’hui que Kylian Mbappé ? Lorsqu’un prodige du football aux capacités intellectuelles élevées explose tous les repères et les statistiques d’un sport devenu stratosphérique, il ne doit plus seulement compter sur ses capacités sportives pour être admiré, mais se doit de se mettre aux services des plus faibles.
Le fait qu’il ait abandonné ses revenus liés à l’équipe de France en faveur d’associations a rapidement démontré sa nature généreuse. Cela ne semble pas grand-chose mais encore faut-il se rappeler qu’il a été le premier à le faire, et ce dès le début de sa carrière internationale alors même qu’il n’était qu’un adolescent. Élevé avec les valeurs du respect par des parents hors du commun, il est doté naturellement du sentiment de considération envers les plus défavorisés. Depuis ses débuts professionnels, Kylian Mbappé est un donateur durable du milieu associatif français, notamment à l’égard de la Fondation Abbé Pierre réputée pour être l’une des plus efficace de l’hexagone dans l’aide aux plus démunis.
Très actif également sur le plan associatif, il est parrain de l’ONG Premiers de cordée qui soutien des enfants hospitalisés ou handicapés, et a lancé sa propre association « Inspired by KM » qui aide à réaliser les rêves de 98 jeunes en accompagnant leurs projets jusqu’à leur entrée dans la vie active.
Parfaitement entouré, enfant précoce doté d’une communication exceptionnelle, ce surdoué a toutes les qualités requises pour être l’ambassadeur d’un projet rassembleur autour de la question des droits de l’Homme. Outre rattraper Messi et Pelé au sommet de son sport, Mbappé, je l’espère de tout mon cœur, deviendra l’influenceur planétaire capable de rendre meilleur ce monde devenu fou.

Au travers de mon parcours complexe, passionnant et semé d’embûches, je souhaite apporter le témoignage qu’être « différent » – ou HPI pour ce qui concerne Mbappé – autorise tous les espoirs dès l’instant où la passion et la persévérance l’emportent. Que tous les gens qui sortent de la norme n’hésitent pas à saisir leur chance comme je le fis avec acharnement et conviction pendant toute ma vie. Comme Mbappé aujourd’hui, je voulais innover pour surprendre et laisser une trace de mon passage. Véritable précurseur j’y réussissais fort bien il y a plus d’un demi-siècle, quelquefois même au-delà de mes espérances même si, autiste Asperger sans le savoir, mon déficit de communication était évident.
Petite parenthèse pour éviter tout malentendu : j’adore Mbappé qui, de mon avis, est le premier à vraiment égaler Pelé au niveau d’un charisme planétaire qui dépasse largement le domaine sportif. Et sur ce dernier point, il dépasse nettement Pelé ! C’est ce qui le différencie de CR7 et Messi qui ne sont, eux, que de simples footballeurs. Je rigole donc de nos nombreuses similitudes, car sur le plan du comportement, notamment adolescent, nous étions pareils. Mais ne vous y trompez pas, je suis bien conscient que lui est l’un des meilleurs joueurs du monde tandis que moi, je ne régnais que sur mon environnement.
Chacun fait comme il peut, quand il le peut et au moment où il le peut, l’important étant de s’imposer à l’époque qui est la sienne ! Mais je vous l’assure, autiste Asperger et bisexuel de surcroît, je vous laisse imaginer la situation rarissime et le cocktail explosif que j’ai pu provoquer dans les années 60 – 80 dans le milieu du football en Suisse, le sport le plus médiatique de la planète où l’homophobie règne toujours en maître aujourd’hui. »

EXEMPLE D’UNE GROSSE DIFFÉRENCE !

« J’étais un footeux. Je l’ai été au plus profond de mon âme. Footballeur, entraîneur, manager, journaliste sportif. Certainement de manière excessive mais c’est vraisemblablement ce qui m’a permis d’aller au-delà de ce que je pouvais espérer. Je l’ai été à une époque où le sport n’était encore qu’un loisir dont les revenus n’étaient que subalternes. Le football professionnel n’en était qu’à ses balbutiements. Les meilleurs pouvaient prétendre à quelques avantages en fin de carrière : une reconnaissance locale, un peu d’argent de poche, un petit commerce ou au mieux devenir représentant d’une marque de sport.

Seuls les meilleurs pouvaient espérer des émoluments équivalents à des cadres supérieurs. Les premiers joueurs emblématiques qui commencèrent à gagner beaucoup d’argent furent Di Stefano, Kopa puis bien sûr Pelé. Rien à voir évidemment avec les folles rémunérations actuelles étant donné l’envolée médiatique du football sur le plan planétaire. »

« Ce fut le début d’une aventure qui me conduisit, vingt-cinq ans plus tard, à brasser les millions que les banques me prêtaient pour rouler dans la Rolls que j’avais tant désirée… »

Seuls les meilleurs pouvaient espérer des émoluments équivalents à des cadres supérieurs. Les premiers joueurs emblématiques qui commencèrent à gagner beaucoup d’argent furent Di Stefano, Kopa puis bien sûr Pelé. Rien à voir évidemment avec les folles rémunérations actuelles étant donné l’envolée médiatique du football sur le plan planétaire. »

IRR SA, une de mes sociétés de l’époque

Chapitre 1

Du rêve à la réalité

« Je voulais simplement être le meilleur partout. Sauf peut-être à l’école ou tout autre environnement m’imposant contraintes et obligations. Non pas que je ne souhaitais pas m’instruire, mais en classe le sempiternel rabâchage destiné aux moins réceptifs m’ennuyait : j’avais compris instinctivement que l’enseignement collectif ne pouvait que freiner l’éclosion des meilleurs. L’élève que je fus ne se souvient pas d’avoir fait un seul devoir à la maison. Je me débrouillais toujours pour les faire en classe pour éviter de devoir y passer du temps au détriment d’un football omniprésent dès lors que je l’eus découvert.

1957 Di Stefano et Kopa

J’avais 9 ans et nous venions d’emménager dans un immeuble situé au pied d’un terrain de football. C’était la première fois que je voyais des hommes en cuissette courir et se disputer la possession d’un ballon. Rapidement passionné par ce sport, je l’ai pratiqué avec acharnement pour combler mon retard technique, au point que 2 ans plus tard on me surnommait « Kopa », le nom du meilleur joueur de la coupe du monde 1958. Il était mon idole.

Dès lors, la cour d’école et le terrain communal devinrent mon royaume et ma seule ambition était de vivre pour ce sport. Ballon sous le bras quand il n’était pas au pied, j’étais devenu une véritable attraction. Je faisais le serment, à qui voulait l’entendre, de vivre par et pour le football en ajoutant comme si c’était une évidence : « Et je roulerai en Rolls-Royce avec chauffeur ! » Je n’avais pas encore 12 ans. Cette ligne de conduite ne m’a jamais quitté, au point qu’étudier ou faire un apprentissage me semblait inutile et que je passais mon temps à faire des calculs pour avoir juste la moyenne afin de ne pas redoubler.

Fils d’un syndicaliste socialiste convaincu, qui croyait que Staline allait libérer la classe ouvrière, je rêvais d’aller me perfectionner en URSS dans un de leurs camps de sport où la discipline était militaire et où chacun était obligé de se surpasser. L’effort et les privations ne m’effrayaient pas, Je voulais devenir un champion, au prix de tous les sacrifices. Cela ne dura que « le temps des cerises ». Rapidement le bon sens et la raison me firent comprendre que mon père et moi n’étions pas sur la même longueur d’onde sur le plan politique et que les paroles d’un père ne valaient pas l’expérience d’un fils entreprenant et indépendant.

Avide de liberté, rebelle permanent, j’étais tout simplement ingérable. Un adolescent insupportable aux yeux de ceux qui ne cherchaient pas à me comprendre. Véritable impatient viscéral, j’étais tout simplement incapable de débattre sur ce qui me semblait évident, ni d’avoir un simple échange ou une conversation banale : j’étais un Asperger sans le savoir. Je ne l’appris que cinquante ans plus tard, à l’aube de ma retraite.

J’ai compris, au hasard d’une émission de télévision, pourquoi une ascension aussi folle qu’improbable avait pu se produire. En fait, j’étais porteur du syndrome d’Asperger une dénomination dont j’ignorais totalement l’existence. Comme pour la grande majorité des gens d’ailleurs puisque cette pathologie était encore inconnue du grand public jusqu’au début des années 2000. Ce jour-là, à 62 ans, je me suis aperçu enfin pourquoi j’avais multiplié les erreurs, notamment de communication. Ma franchise abrupte était celle d’un autiste. Il est clair que vis-à-vis des journalistes celle-ci ne constituait pas un comportement adéquat : quand je les trouvais nul, je le leur disais sans détour. Et c’était fréquent, pour ne pas dire invariable !

Naturellement, bon nombre d’entre eux m’auraient été bien utiles si je ne les avais pas retournés contre moi, mais comme la réussite ne cessait d’être au rendez-vous, je n’y prêtais guère attention. Cette singularité me valait un caractère trempé doublé d’un comportement agaçant auquel je ne pouvais rien changer tant il était ancré en moi. J’étais juste un être différent parce qu’atteint de troubles du spectre autistique.

Mes « irréductibles jaloux professionnels » n’avaient de cesse de me « dézinguer » alors que je rebondissais de projet en projet à leur grand dam ! Ce fut comme ça pendant un demi-siècle. Cette révélation mit pourtant fin à une angoisse de près d’un demi-siècle pendant lequel, j’ai réussi tout ce que j’entreprenais alors que mon comportement ne ressemblait à aucun autre : je faisais le contraire de ce qui semblait usuel, j’inventais au fur et à mesure : j’étais en fait un innovateur indéfectible.

Et malgré tous ces handicaps comportementaux qui ne pouvaient que me rendre antipathique, donc peu enclin au succès, je m’en suis sorti indemne en vivant pour et par le football. Bref, en réalisant mon rêve d’enfant. Cinquante belles années pendant lesquelles j’ai eu constamment l’impression d’être entouré de personnes insignifiantes ou, tout au moins, pas assez intéressantes à mon goût : la médiocrité m’excédait. Seuls mes amis les plus proches, notamment mon ami Luis qui ressortait du lot, semblaient échapper à cette règle.

Mon cercle familial n’arrivait pas à saisir la complexité qui m’habitait, à l’exception de ma grand-mère qui me donnait l’impression de souffrir d’une solitude intellectuelle identique à la mienne. Elle m’adorait et je le lui rendais bien : elle semblait être la seule à me comprendre. D’ailleurs, adolescent, c’était à ma grand-mère à laquelle je pensais quand je voyais mon avenir :

–  Grand-maman, plus tard, quand je serai célèbre, je t’offrirai une maison, une belle maison, une grande maison !

Ma grand-mère était une femme intelligente. La vie ne l’avait pas épargnée mais elle gâtait les autres. Je la chérissais comme si, malgré mon jeune âge, je devinais qu’elle était une exception elle aussi. Elle me regarda alors tendrement et me répondit :

–   Ah non, pas une grande maison !

–   Pourquoi donc, tu la mérites bien ?

Elle sourit et murmura :

–  Plus elle sera grande, plus elle sera difficile à entretenir ; alors une petite suffira !

Elle était très fière de sa situation, très contente que je pense à elle.

– Non mamy, tu posséderas une grande maison et pour l’entretenir, tu auras du personnel !

Là, elle a dû se dire : « celui-là, il voit toujours tout en grand ! » Je ne saurai jamais si telle était sa pensée, mais ce qui est certain, c’est que cet adage résume parfaitement toute ma vie, aussi professionnelle que personnelle. Malheureusement, elle décéda avant que je ne puisse lui offrir sa belle et grande maison.

Le football fut le début d’une aventure qui me conduisit, vingt-cinq ans plus tard, à brasser les millions que les banques me prêtaient pour rouler dans la Rolls que j’avais tant désirée. Les banques étaient plus dispendieuses que maintenant. Si on était innovateur et sans argent, on pouvait vivre à crédit si on acceptait de payer des intérêts entre 4 et 15 %. J’avais donc peu d’argent mais j’étais un très grand innovateur.

Pendant quelques années, Freddy Girardet, Grand Maître de la gastronomie planétaire, me fit l’honneur de me considérer comme l’un de ses meilleurs clients. Freddy recevait tous les grands de ce monde. De Pelé à Platini, de Nixon à Mobutu, aimées ou détestées, toutes les célébrités venaient s’y régaler. Freddy était un ancien footballeur que j’ai côtoyé à Renens et à Crissier : il penchait en faveur des « anciens » et moi j’étais le leader des « jeunes » qui voulaient les détrôner ! 20 ans plus tard, il était devenu l’un des deux meilleurs cuisiniers du monde et là, il était indétrônable avec le seul qu’il considérait comme son égal : Joël Robuchon.

À la tête d’une douzaine de sociétés, je venais manger dans son restaurant une à deux fois par mois et j’étais toujours entouré de clients ou de courtisans. Une fois le service fini, Freddy allait se coucher en nous laissant un garçon qui s’occupait de nous jusqu’à l’aube. Nous squattions le bar de l’Hôtel de Ville, et quand nous partions après avoir mangé un ultime plat de raviolis aux truffes, il commençait à faire jour et plus personne n’avait soif. Quant au garçon, un bon pourboire lui suffisait pour oublier les heures de sommeil perdues.

Une chose m’amusait terriblement : lorsqu’il m’arrivait de garer mon véhicule à la place de Freddy, le personnel regardait cette incursion inhabituelle par la fenêtre en s’offusquant de mon impertinence. La première fois que cela se produisit, le maître d’hôtel sortit pour m’expliquer que c’était la place du Patron. Je lui répondis qu’il n’y avait pas de problème, que Freddy comprendrait, et dès lors plus jamais personne ne me fit de remarque. Il faut dire que Freddy était passionné de vélo et que sa Porsche, il la laissait la plupart du temps au garage !

Même Freddy n’aborda jamais ce sujet. D´autant plus que si ce n´était pas une Rolls, c´était une Porsche, une BMW ou une Mercedes, un tournus qui faisait fantasmer ceux qui ne pouvaient pas comprendre. Encore une fois, nous étions à une époque où les taux d’intérêt étaient élevés mais les crédits-bails faciles à obtenir, et la fiscalité était conciliante avec le nombre de voitures que les sociétés pouvaient avoir. Et je l’avoue, nous en avons tous – mes collaborateurs et moi-même – quelque peu profité. Aujourd’hui, tout serait beaucoup plus compliqué. Ah les fameuses « trente, voire des quarante glorieuses » que personne ne revivra plus jamais.

Freddy ne disait rien, il n’était pas stupide. Pour m’avoir côtoyé comme coéquipier, il connaissait mon caractère : il n’allait pas prendre le risque de me faire des remarques inopportunes qui pouvaient lui faire perdre un excellent client. Pour lui, l´argent était au centre de toutes les conversations. Ceci me faisait sourire, moi qui passais mon temps à le voir filer entre mes doigts. Il était lui aussi très intrigué par les signes extérieurs de richesse que je ne dissimulais guère ! Lorsque le « Grand chef » – qui figure dans le Petit Larousse – assit à notre table en fin de repas se levait, en promettant un dessert spécial, je peux vous certifier que le résultat était exceptionnel. Seul dans sa cuisine, il créait une véritable œuvre d’art culinaire. Freddy était mon cuisinier favori. Comme quoi dans le fond on avait tout pour s’entendre.

Ce fut le temps de la revanche pour un ancien pauvre devenu riche. Le petit footeux qui sacrifia son adolescence au seul service du football sentit le besoin de rattraper le temps perdu en vivant, à 35 ans, un parcours d’adolescent qu’il avait occulté pour réaliser ses rêves d’enfants. Après avoir cessé mes activités dans le football – à l’exception de celle de manager – les circonstances voulurent que je me retrouve à gérer de nombreuses sociétés, dont trois importantes salles de sport. Encadré par mes anciens juniors les plus proches que je considérais comme mes enfants, j’ai choisi de m’éclater avec eux. Ce fut un feu d’artifice même si sur le plan d’une gestion responsable, je concède avoir démontré certaines limites !

 Optimiste naturel, certain que toute difficulté trouverait toujours une solution, je pensais que la roue tournerait dans le même sens, que je serais toujours assez intelligent pour gagner de quoi vivre. Dépensier et généreux, je dois à mon ami et associé Luis Garcia de m’avoir évité de graves désillusions en reprenant les rênes d’un groupe très endetté, dont je dépendais complètement.

Luis ne mélange jamais les affaires avec les sentiments. Tout le contraire de ma vision des choses qui, je dois l’admettre, était pour le moins utopiste. Il est clair que je n’avais pas l’âme d’un gestionnaire, sauf lorsque je défendais les intérêts de ceux que j’aimais : là, j’étais le plus redouté des managers à une époque où cette profession ne faisait qu’éclore.

L’amitié est une chose rare et précieuse. On croit être entouré de beaucoup d’amis mais face aux difficultés trop peu répondent présent. C’est dans la peine que l’on reconnaît ses amis ! Nous prenons conscience de cet aphorisme le jour où nous y sommes confrontés. C’est ce qui m’arriva au point que rétroactivement j’ai presque l’impression d’avoir « acheté » mes amitiés. Ce qui bien entendu ne m’avait jamais traversé l’esprit tant je les aimais « mes amis ». Être généreux avec eux me semblait logique !

Je possédais tout, du moins je le croyais : pouvoir, argent, relations, bref une vie professionnelle bien remplie et enrichissante dans tous les sens du terme. Que rêver de plus ? J’étais comblé. J’aurais pu ne m’apercevoir de rien, ne rien comprendre. Confortablement installé dans ma vie, inconscient des réalités, je brûlais la chandelle par les deux bouts emmenant dans mon sillage ceux qui m’entouraient. J’avais tant à faire, rien ne pouvait m’arriver. Jusqu’au jour où ma vie bascula… En 2007.

 Un accident de parcours qui m’a fait descendre de mon piédestal. Un fait de vie qui m’a enfin permis d’ouvrir les yeux sur mon univers et de comprendre combien je m’étais trompé. Tout n’était qu’un leurre : ce train de vie princier qui m’étourdissait, mon entourage superficiel qui m’a tourné le dos dès que je me suis trouvé en position de faiblesse face à la maladie. Lorsque la santé est chancelante, que la vulnérabilité paraît avoir pris le dessus, il semble si humain de s’éloigner de celui qui auparavant était une source de succès.

Oubliée la locomotive généreuse, entreprenante et pleine d’énergie qui leur ouvrait des perspectives auxquelles ils n’auraient jamais pensé. Mes disciples ne trouvaient rien à dire face à mon caractère excessif pour n’y voir que l’intérêt qu’ils pouvaient en tirer. Mais maintenant que ce jeune talent ambitieux ne semble plus être utile, ils pensent à voix haute que mon comportement passé – certes hors-norme et excentrique – fut inacceptable. Ils semblent omettre qu’ils en ont pleinement bien profité. Mais je comprends leur gêne : après avoir enterré quelqu’un redevenu vivant, comment vivre avec ? La reconnaissance est une denrée rare ! On m’expliqua même que tout cela était normal, dans la nature des choses. En tout cas pour moi, ça ne l’était pas !

 J’étais leur patron incontesté, je me rends compte aujourd’hui que notre relation de confiance a été gravement écornée. Lorsque j’interroge ceux dont le comportement à mon égard ne m’a pas semblé « élégant » au cours de ces mois d’épreuve, tous répondent de la même manière :

–  On ne pouvait rien te dire, tu n’écoutais rien !

Qu’avaient-ils donc à me dire ? Et pourquoi ne le pouvaient-ils pas ? En tout cas cette réponse devait leur avoir été soufflée : tous ont récité la même, et de façon unanime, comme une sorte d’adage.

Et quand j’insiste :

–  Que m’auriez-vous dit si vous aviez pu le faire ?

Ils restent bouche bée, avant de bredouiller qu’il aurait fallu que je cesse de boire du whisky. J’admets que j’exagérais de ce côté-là, mais si c’est leur seule suggestion, je pouvais m’en passer ! D’autant plus que le whisky, je m’y suis mis à l’âge de quarante ans. J’ai pris mon premier verre de vin à 28 ans. Ce fut même Monsieur Paul Rinsoz, le Président mécène du Vevey-Sport que je considère comme un père spirituel, qui m’invita à déguster un verre de « Clos du Rocher », un excellent « Yvorne », dans sa villa ultramoderne avec piscine intérieure et ascenseur, au bord du lac Léman. Depuis, j’y avais pris goût. J’aime ce qui est bon. Y a-t-il du mal à ça ?

 Quand l’argent afflue puis reflue, chacun ne retient que son propre intérêt en oubliant souvent ce qu’il doit à l’autre. Ceux qui croient à l’amitié éternelle, ont-ils vraiment eu l’occasion de la tester ? Certes ce n’est en rien une nécessité, mais croyez-moi c’est face aux grandes difficultés qu’on peut véritablement juger la profondeur de celle-ci. Dans l’adversité, il est facile de s’apercevoir que ceux qu’on considérait comme de vrais amis oublient toutes les largesses et la générosité qui leur furent accordées pour ne retenir que les obligations qui en ont découlé. 

Mon ami Luis me le répétait en boucle : « ne mélange jamais les amis aux affaires ! » Malheureusement, lorsqu’il m’a rejoint au sein du groupe, c’était déjà trop tard : j’avais déjà favorisé une dizaine d’amis plutôt que de simples employés. Dès lors, lorsqu’il reprit la direction du groupe, « l’erreur » étant en place et il dut faire avec. Bien entendu, rétrospectivement je ne peux qui lui donner raison sur toute la ligne.

J’en vins donc à constater que l’amitié se fane rapidement, tout comme la beauté pour celui qui en est trop pourvu. L’excellence est aujourd’hui en perte de vitesse, la loi du plus fort prédomine et le populisme triomphe dangereusement à cause des « Fake News » qui font actuellement la pluie et le beau temps sur la politique. L’hiver sera rude et ce malgré un réchauffement climatique établi. »

« Un épisode de ma vie me revient : Nous sommes en 1975, Monsieur Rinsoz, mécène et Président du Vevey-Sport, m’offre la possibilité unique de devenir, à 27 ans, le plus jeune entraîneur de football professionnel de nationalité suisse en ligue nationale. »

« Tu mets le chiffre que tu veux ! »

« Septembre 1975, Monsieur Paul Rinsoz, un chef d’entreprise décoré chevalier de la Légion d’honneur française, grand ami d’Houphouët-Boigny, homme politique français puis homme d’État ivoirien, venait de reprendre la Présidence du Vevey-Sport dont il était le mécène. Le club de football de la ville qui abrite le siège de Nestlé venait d’être relégué de la 1ère division suisse (LNA). Bon avant-dernier en LNB après un début de saison catastrophique, éliminé de la coupe de Suisse par une équipe de 1ère ligue, le Vevey-Sport était à l’agonie. C’est dans ce contexte que Monsieur Rinsoz me proposa en personne de devenir le manager de son équipe-fanion.

Luis Garcia, mon meilleur ami faisait déjà partie de l’effectif ; il se languissait sur le banc alors que quelques mois auparavant il avait été un des principaux acteurs de l’ascension du CS Chênois en LNA. Je connaissais bien son potentiel puisqu’il fut l’un de mes meilleurs juniors lorsque je pris la décision de faire une carrière d’entraîneur mettant fin du coup à mes ambitions de joueur. Il logeait chez mes parents lorsqu’il rejoignit le CS Chênois et que moi-même, je me suis retrouvé à prendre la direction du « secteur avenir » de ce club qui m’offrit alors, à 24 ans, la possibilité de devenir le premier entraîneur-formateur à bénéficier d’un statut professionnel en Suisse.

Lorsque les dirigeants du club genevois me recrutèrent, leurs juniors venaient de quitter la catégorie régionale pour accéder à la seconde division interrégionale du pays. Trois ans après mon arrivée, leur section junior était devenue l’une des plus importantes du pays, dépassant largement les deux clubs phare du canton de Genève : le FC Servette et l’ES Carouge. Une progression que j’avais promise aux dirigeants lors de ma nomination.

 Edmond Desjacques, le président du CS Chênois, m’honorait d’une totale confiance mais cette dernière ne faisait pas l’unanimité de ses collègues du comité : ils me trouvaient trop indépendant et quelque peu ingérable. En fait je n’en faisais qu’à ma tête. Et comme mon équipe ne cessait de gagner et que je consacrais corps et âme à mon travail, il était difficile de me désavouer. En juillet 1975, confiant en mes capacités, Edmond Desjacques avait d’ores et déjà paraphé le contrat de 3 ans qui m’assurait la direction de l’équipe première, qui évoluait alors en LNA, au 1er juillet 1976 date à laquelle Peter Pazmandy, l’entraîneur en place, devait reprendre le FC Servette, l’une des plus prestigieuses formations du pays. J’étais donc sous contrat avec le CS Chênois jusqu’au 30 juin 1978.

Parallèlement à mon activité d’entraîneur, j’étais chroniqueur à « La Semaine Sportive » le seul journal sportif de Suisse romande. Je disposais alors d’une page entière pour m’épancher librement et livrer le fond de ma pensée sous la férule bienveillante de Christian Bonardelly, le propriétaire et Directeur du journal, qui s’amusait à m’opposer à Jacques Ducret, le plus réputé des journalistes de Suisse romande qui était le responsable de la rubrique football du journal. Ma chronique était l’une des plus lues de « la Semaine Sportive. »

Spectateur d’un match désastreux du Vevey-Sport, il ne me fallut qu’un article pour expliquer que la seule solution pour éviter au Vevey-Sport une relégation désastreuse était la nomination du mécène du club à la présidence, car lui seul pouvait prendre les mesures drastiques qui s’imposaient. Il ne fallut pas longtemps pour que Monsieur Rinsoz reprenne la Présidence du club. En écrivant cela, je ne faisais que dresser un constat évident, j’étais bien loin de penser que le futur sauveur du club puisse être moi puisque, assuré d’une place d’entraîneur de LNA à la fin de la saison, je n’étais pas du tout à la recherche d’autres responsabilités.

Je me trouvais donc confronté à un choix cornélien : soit je devenais entraîneur de LNA dans neuf mois – ce qui m’aurait valu d’être le plus jeune technicien d’Europe à ce niveau – ou bien j’acceptais d’être le « capitaine des pompiers » de Monsieur Rinsoz. Dans le second cas, j’étais en position de remettre mon ami Luis sur les rails : comme son moral était en berne, peut-être était-ce l’élément qui a fait pencher la balance.

Très intelligent, Luis exerçait une grande influence dans le vestiaire : « en deux coups de cuiller à pot » comme on dit, il pouvait se mettre tout le monde dans la poche. Luis était donc confronté à l’hostilité de l’entraîneur Hanke, un Tchécoslovaque qui évolua au Barça, mais dont les méthodes d’entraînement étaient dépassées. Ce dernier ne maîtrisait plus la situation et la grande majorité des joueurs réclamait son départ.

Luis, mon interprète, en discussion avec Di Stefano pour obtenir une entrevue pour la « Semaine Sportive » dont j’étais le correspondant.

 J’étais ami avec Luis depuis l’adolescence et nous étions inséparables depuis l’adolescence. Il me servait aussi d’interprète lorsque nous partions en vacances en Espagne et que j’en profitais pour faire des reportages sur le Real Madrid, le FC Valence ou encore le FC Barcelone afin de financer notre séjour. Étant son mentor, je connaissais parfaitement ses qualités et ses défauts. Peu de gens pouvaient se targuer d’avoir autant de caractère que lui. Il est clair que si j’étais resté au CS Chênois en qualité d’entraîneur de l’équipe-fanion, je l’aurais fait revenir dans mon contingent.

Ma première rencontre avec Monsieur Rinsoz était pour superviser son équipe qui était en déliquescence et pointait à l’avant-dernière place du classement de LNB. Une semaine auparavant, après que le Vevey-Sport eut été éliminé de la coupe de Suisse par le Stade Nyonnais, « 24 heures » – le quotidien le plus lu en Suisse romande – titra : « Vevey ou le naufrage d’une équipe » Le malade était sous perfusion. Monsieur Rinsoz et moi étions donc côte à côte autour du terrain de Meyrin sur lequel l’équipe du Vevey-sport se débattait. Au fur et à mesure de la rencontre, je lui faisais part de mes commentaires techniques et tactiques, un domaine dans lequel j’étais intarissable : il faut dire que je vivais 24/24 heures de mon temps pour ce sport et ceci 7 jours sur 7, donc je parlais de ce que je savais !

 Une fois rentré chez lui, Monsieur Rinsoz demanda à Luis de venir le rejoindre :

– Luis, j’ai vu le match avec ton ami Christian. Franchement, personne ne m’avait jamais parlé de football de cette manière. Il a été impressionnant. Il voyait tout et devinait même ce qui allait arriver. C’est lui qu’il me faut pour reprendre en main ce club. Je vais lui téléphoner, tu peux le lui dire !

Son appel téléphonique ne fut donc pas réellement une surprise pour moi : je savais que je partais avec un bon a priori. Dans le choix que je ferais, c’était la liberté d’agir qui m’importait en premier lieu et ensuite la compréhension d’Edmond Desjacques, le Président du CS Chênois qui m’avait toujours fait une totale confiance.

 Lorsque Monsieur Rinsoz vint me trouver, il m’impressionna vivement : jamais je n’avais rencontré une personne d’un tel niveau, et ce dans tous les domaines. Une de ses seules faiblesses – que j’ai détectée par la suite – était qu’il était très sensible aux critiques médiatiques ; il les craignait pour être exact, ce qui n’était pas du tout mon cas car j’avais plutôt tendance à les provoquer.

Monsieur Rinsoz me tutoya d’entrée et me pria de faire de même, ce que j’ai poliment refusé :

– Excusez-moi Monsieur Rinsoz, mais là vous m’en demandez trop ! Je suis trop jeune et pour moi ce serait vous manquer de respect.

Il sourit mais je savais qu’il avait apprécié. Dorénavant nous allions donc nous respecter : je le vouvoierais et il me tutoierait. Mais ceci ne m’empêcha pas de lui avoir toujours dit le fond de ma pensée sans aucun détour.

Une franchise excessive qui constituait une de mes « tares » caractéristiques : je l’impressionnais par mes remarques au vitriol. J’étais d’ailleurs le seul à le critiquer au point qu’il disait souvent en riant et à qui voulait l’entendre :

– Avec Christian au moins pas de mystère, on sait toujours ce qu’il a sur le cœur !

 Pour entrer dans le vif du sujet vu que je n’étais pas demandeur, j’ai bien évidemment exigé la direction unilatérale du secteur sportif du club, soit l’équipe-fanion, le secteur-avenir et le recrutement. En fait, un rôle de « manager à l’anglaise », vingt ans avant que ce terme ne soit utilisé en Europe continentale : Directeur sportif pour faire simple. Il accéda à ma demande sans hésitation, ajoutant à mes prérogatives le département des sports de son usine, que j’allais laisser intégralement à ma secrétaire. Il faut savoir déléguer, non ? Sourire aux lèvres, Monsieur Rinsoz avait même ajouté :

Tout ce que tu veux Christian pour prendre la barre de mon navire !

Une métaphore qu’il avait déjà utilisée lorsqu’il m’avait appelé au téléphone la première fois. Ce qui m’avait bien fait rire :

– Christian, accepterais-tu de me rejoindre sur ce navire qui coule ?

– Je ne sais pas nager, mais si vous me laissez agir comme je l’entends, je vais vite vous le renflouer « votre Titanic » !

– Tu en seras le seul capitaine !

À la suite de quoi, il avait éclaté de rire bruyamment ; ce fut la seule fois que je l’entendis rire aussi fort ! Nous avions alors convenu de nous rencontrer.

 Après nous être mis d’accord sur mes prérogatives, Monsieur Rinsoz sortit son chéquier, un stylo et me le tendit :

– Tiens Christian, tu mets le chiffre que tu veux !

J’étais interloqué, je n’avais jamais pensé à ça. Qu’il me donne la barre de son « Titanic » me paraissait logique et sage, vu qu’un navire sans pilote peut rencontrer un iceberg, mais avec mes 1 500 CHF en banque et un salaire de 2 500 CHF au CS Chênois, l’histoire du chèque en blanc, c’était un peu le ciel qui me tombait sur la tête : je n’y étais tout simplement pas préparé ! Jusqu’à présent je travaillais et j’étais heureux de vivre de ma passion en gagnant ma vie normalement.

Monsieur Rinsoz, qui n’était tout de même pas né de la dernière pluie, avait prévu mon désarroi ; il posa donc le chéquier devant lui et avant que je n’ouvre la bouche, il poursuivit :

– Quarante mille francs à la signature, ça te va ?

Sans attendre ma réponse, il avait déjà commencé à remplir le chèque.

Incroyable ! Avant toute négociation financière, j’avais 40’000 francs suisses en poche ! Je n’en avais même pas encore parlé avec le CS Chênois : j’étais stupéfait ! Aujourd’hui, un tel montant peut paraître désuet, mais à l’époque c’était une fortune.

 En tendant mon chèque au guichet de la banque quelques heures plus tard, le caissier n’en revenait pas non plus. Il faut dire qu’actuellement une telle offre correspondrait à des centaines de milliers de francs ! Après avoir bredouillé quelques mots, la main tremblante et le chèque au bout des doigts, le jeune employé se leva et s’adressa à son chef qui était tranquillement assis cinq mètres plus loin. Je le vis se pencher et l’autre lui répondit stoïquement :

– C’est un chèque de Monsieur Rinsoz, il n’y a même pas besoin de vérifier, payez !

Dès ma sortie de l’agence, moi « le petit », je me sentis l’âme d’un géant. Voilà comment en 1975, je me suis retrouvé avec 41’500 CHF sur mon compte en banque avant même d’avoir commencé à travailler. J’étais déjà le plus jeune instructeur du pays, sa proposition me permit de rejoindre le TOP 5 des techniciens les mieux payés en Suisse.

 J’allais habiter à Corsier sur Vevey, le même village que Charlie Chaplin qui bénéficiait d’un forfait fiscal. Certes je payais moins d’impôts que lui mais j’étais déjà un excellent contribuable pour la commune. Et ceci sans jamais me prendre pour « un Charlot ! » J’avais appris la particularité fiscale de l’acteur par le biais du syndic de la commune. Ce dernier était l’intendant de mon équipe ! C’est d’ailleurs lui qui allait me trahir par la suite et qui 30 ans plus tard finira en prison pour détournement de fonds au détriment du Vevey-Sport qui avait été repris par le fils de Kofi Annan, l’ancien secrétaire général de l’ONU. Comme quoi cet intendant n’était « qu’un Charlot » et que, finalement, il y a une justice ! »

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Une ascension peut-elle être plus fulgurante ?

Dès son plus jeune âge, Frédéric Chris – alias Christian Imbach – a montré un talent hors de la norme, que ce soit sur ou hors du terrain de football, où son leadership et sa personnalité ont révolutionné son environnement et marqué ceux qui l’ont côtoyé.

À 10 ans, il découvre le football. Dès l’âge de 11 ans, fan de Raymond Kopa, il sera affublé du surnom de son idole jusqu’à la fin de son adolescence. Une année plus tard, il dirige sa première équipe en créant sa propre équipe de quartier, dont la grande majorité des joueurs étaient plus âgés que lui, avant de rejoindre l’équipe junior du club de sa commune.

Il accepte d’être promu en équipe fanion de son club à 17 ans à la condition expresse de ne pas être remplaçant. Parallèlement, il prit l’initiative de reprendre une équipe junior en déliquescence pour construire un groupe qui, finalement, dominera son canton pendant plusieurs années. C’est alors qu’il recevra un ultimatum de son club le sommant de choisir entre son rôle de joueur et celui d’entraîneur.

Face aux soutiens de ses jeunes, il décida, à la surprise générale de ses dirigeants, de cesser d’être joueur pour devenir entraîneur de ses jeunes qui firent sécession. Cela mit fin à son ambition de devenir entraîneur-joueur de son club avec l’ambition déclarée de le promouvoir en Ligue Nationale avec les jeunes qu’il aurait formé.

Dès ces 20 ans, chroniqueur influent pour le journal bi-hebdomadaire « la Semaine sportive », il rencontrera les plus grandes stars de la planète parmi lesquelles Di Stefano, Pelé, Suarez, Mazzola, Rivera ou encore Helenio Herrera qu’il interviewa pour se payer des vacances.

Il avait 24 ans lorsqu’il fut appelé à Genève pour restructurer la section junior du CS Chênois qui n’était alors que le faire-valoir cantonal face à l’ES Carouge et le FC Servette. Trois ans plus tard, le CS Chênois avait pris un « leadership » incontestable sur ces derniers.

Devenu instructeur national, il sera sollicité pour reprendre le Vevey-sport, fraîchement relégué de LNA, qui frayait avec la relégation en LNB. À 27 ans, il obtiendra les pleins pouvoirs pour reprendre ce club devenant du même coup le premier Suisse à devenir professionnel dans ce métier. Il redressa brillamment cette équipe prouvant ainsi que ses méthodes révolutionnaires, mises en œuvre lors de son parcours initial de formateur étaient non seulement adéquates mais surtout sources de succès.

Il avait surtout atteint le but qu’il s’était fixé à l’âge de 12 ans : vivre par et pour le football à une époque où les meilleurs joueurs du pays n’étaient encore que des semi-professionnels.

Après qu’il eut dû quitter le Vevey-Sport, c’est Paul Garbani qui accèdera à la Ligue Nationale A avec un contingent de joueurs qui, pour la plupart, avaient été initiés lors de son intronisation en 1975. Et les jeunes de Vevey qui ne participaient pas à cette ascension dont Christian Imbach – alias Frédéric Chris – s’étaient occupés auparavant évoluaient déjà en LNA. Au Grasshopper de Zurich pour Sulser qui deviendra le meilleur attaquant du pays ou encore Gretler qui deviendra international sous la houlette de Blazevic au Lausanne-Sport. Au Neuchâtel-Xamax pour Stéphane Forestier qui sera un pilier du club « européen » de Gilbert Facchinetti alors que le futur international Christian Matthey ouvrira la porte à Pascal Gavillet comme attaquant au FC Servette. Enfin – car nous en sommes à 5 joueurs qui n’avaient pas 20 ans quand il les a titularisés en ligue nationale au Vevey-Sport – il faut ajouter à cette pléiade de jeunes qui confirmèrent leur talent par la suite, l’incontournable Yves Débonnaire qu’il avait nommé capitaine de son équipe malgré son très jeune âge. Ce dernier évoluera par la suite au FC Sion en LNA avant de devenir un cadre majeur de l’Association suisse de football comme éducateur doublé d’un brillant consultant télévisuel à la TSR ! Celui qu’on compara au « Mago » ou à Napoléon, pouvait-il faire mieux ?

« Christian, si Lucien signe, il y a 20 000 CHF pour toi ! »

Lucien avait 21 ans et j’en avais 31. Après nous être entendus, nous nous serrâmes la main. Ce fut après repas historique au Möwenpick de Lausanne, pendant lequel je lui avais assuré que j’allais en faire une star qui marquera le football suisse à une seule condition : « tu feras ce que je te dis comme je te le dis et surtout, tu ne me cacheras rien ! » Il en fut ainsi pendant plus d’une quinzaine d’années. Une nouvelle vie nous attendait, une véritable aventure commune.

Du coup, l’homme de terrain que je fus s’effaça pour assumer pleinement un rôle d’un conseiller professionnel dont j’ignorais encore l’ampleur de tous les ressorts. Il faut dire qu’une fois de plus j’étais un pionnier en Suisse. En effet, un conseiller personnel qui ne s’occupait que d’un seul joueur, à cette époque, dans le monde, seules les superstars bénéficiaient d’un tel soutien, c’était un rôle bien différent des intermédiaires qui commençaient à poindre « du bout du nez » en Europe.

Au service de ce talent, je peux l’affirmer aujourd’hui, j’innovai jour après jour pour l’amener au sommet. Cette nouvelle activité professionnelle me valut d’être à nouveau d’être calomnié, voire détesté car accusé de profiter de lui. Mais finalement, être systématiquement dénigrés ne me gênait plus, la force de l’habitude ! Incompris, devenu la « tête de Turc » des médias, mon franc-parler qui ne s’est jamais estompé, n’allait pas éteindre l’incendie. Un Asperger ne se refait pas, non ? ! C’est dans sa nature, tout simplement.

Mon premier conseil auprès de Lucien Favre a été d’informer immédiatement les dirigeants du Lausanne Sport qu’il refusait catégoriquement la future politique restrictive du club et qu’il souhaitait que son contrat soit revalorisé à hauteur de 80’000 CHF par an. Leur refus fut catégorique sans même vouloir en discuter. Les dirigeants, sûrs de leur bon droit, n’allaient pas se faire dicter leur conduite par « un gamin » qui venait d’ailleurs de s’engager contractuellement pour deux ans de plus avec leur club ! Sans penser évidemment que ce supplément lui avait été imposé par un entraîneur peu enclin aux sentiments.

Et ils ignoraient une autre chose : Lucien avait un nouveau conseiller qui n’allait pas être impressionné par leur suffisance. Et cette personne c’était moi et ils me détestaient déjà ! En effet dix ans plus tôt, je m’étais déjà opposé à eux lorsqu’ils voulurent piller mon équipe junior au FC Crissier.

Ce club omnipotent avait pour habitude de puiser les meilleurs juniors des clubs des alentours sans aucun scrupule et je fus le premier à exiger une compensation financière importante pour le club formateur ! Donc pour ce qui était de me connaître, il n’y avait pas de problème, mais ils ne se doutaient pas encore que je puisse leur « mitonner aux petits oignons » un plan imparable pour les « forcer » à libérer leur plus grand « espoir », leur plus grand talent depuis l’avènement de « Gabet » Chapuisat !

Pour faire suite à leur dédain face à ses revendications, lors de l’assemblée générale du club lausannois, le « gamin » Favre demanda la parole, se leva et monta à la tribune pour lire une déclaration qui informait clairement tous les membres du club qu’il refusait la future politique d’austérité du club, et affirmait sa volonté de devenir professionnel dans un club capable de combler son ambition. Effectivement, Richard Dürr avec lequel j’avais de très bons rapports et Charly Hertig – deux internationaux lausannois à la retraite – mettaient sur pied un projet à « l’envers du bon sens ». Ce dernier ne correspondait en rien aux ambitions de garçons tels que Lucien Favre puisqu’ils voulaient revenir, ni plus ni moins au semi-professionnalisme !
La veille de ladite assemblée, j’avais pris grand soin d’envoyer une copie du texte écrit par moi et lu par Lucien Favre à mon « ami » Jacques Ducret qui le fit publier pour le lendemain. Ce fut une véritable bombe dont « la Semaine Sportive » en était l’unique bénéficiaire. Du coup, j’étais devenu un informateur prioritaire pour mon ancien concurrent !

L’audace du « gamin » provoqua un véritable tollé. C’était du jamais vu. Il s’ensuivit un bras de fer dont toute la presse se rassasiera. Gilbert Facchinetti, le Président de Neuchâtel-Xamax qui rêvait d’accueillir Lucien Favre à Neuchâtel, se manifesta médiatiquement au point que Miroslav Blazevic, l’entraîneur du Lausanne Sport, spécialiste du double jeu, lui avait déjà téléphoné pour lui proposer d’agir en qualité d’intermédiaire en échange d’une lucrative commission. « Blaze » était un habitué de cette méthode qui lui valut d’être au milieu de plusieurs affaires judiciaires, notamment celle qui conduisit Bernard Tapie en prison alors qu’il était entraîneur au FC Nantes.
Ce fut d’ailleurs la première information que me glissa Gilbert Facchinetti, surnommé « Facchi », lors d’un repas pris ensemble au Cheval Blanc à Saint-Blaise, une des meilleures auberges de la région. Après une telle mise en bouche, j’ai bien senti que nous allions nous régaler. Pour commencer, j’ai donc rassuré mon interlocuteur sur la validité de ma représentation par rapport à celle d’un entraîneur que Lucien détestait. Cette précision me valut une offre spontanée inattendue accompagnée d’un tutoiement immédiat alors que nous ne nous étions jamais rencontrés auparavant :
– Christian, si Lucien signe chez nous, une commission de 20’000 CHF sera pour toi !
Nous nous connaissions depuis cinq minutes et une commission m’était déjà proposée ! C’est clair que pour le novice que j’étais, je m’étonnais de la rapidité avec laquelle l’argent circulait alors même que nous n’avions pas encore commencé à négocier. Facchi ne perdait pas de temps. Il est clair que nous sommes rapidement tombés d’accord vu qu’en Suisse, à l’époque, il n’y avait qu’un seul mécène aussi généreux que lui !
À la fin du repas, le futur salaire de Lucien avait quadruplé, il était logé et nourri par le patriarche et bénéficiait d’un véhicule loué par le garage de la famille. Et Lucien n’avait aucune commission à me verser puisque c’était Gilbert qui s’en chargeait. Pour un jeune qui n’était que stagiaire un mois plus tôt, il est clair que je n’allais pas faire de la surenchère d’autant plus qu’il convenait encore d’obtenir un accord avec le Lausanne Sport sans lequel aucun départ n’était envisageable. Quant à Lausanne Sport, il s’opposait catégoriquement au départ de son talentueux espoir.

Tout ceci se passa à la bonne franquette. Gilbert pensait me soudoyer « finement » en me promettant une commission lucrative qui la plupart du temps restait confidentielle. C’était bien mal me connaître car en qualité d’agent, je n’ai jamais joué double jeu à l’encontre des intérêts de mes joueurs. Donc le soir même sur le chemin du retour, je me suis arrêté chez Lucien à Saint-Barthélemy pour l’informer de ce qui s’était passé. Je commençai par lui préciser que son futur Président m’avait d’ores et déjà promis une commission de 20’000 CHF et qu’il n’aura donc pas besoin de me rémunérer pour cette première transaction !
Bien m’en prit car cela m’évita d’être piégé deux ans plus tard, lorsque le FC Servette se lança à l’assaut de mon joueur. Facchi qui ne voyait pas d’un bon œil le départ de son joueur préféré, me prit à part :
– Chris, tu te rappelles les 20’000 CHF qui t’ont été versés ?
Je lui répondis avec un grand sourire :
– Oui, oui, je m’en souviens parfaitement, Lucien aussi d’ailleurs vu qu’il en fut informé le jour même !
C’était l’arroseur arrosé. On ne piège pas « un éléphant avec une moustiquaire ! » Gilbert n’insista pas, il avait compris. Il me sourit et je fis de même. Lui et moi avions d’excellents rapports qui perdurèrent jusqu’à la fin, alors même que sur certains points nos intérêts pouvaient diverger. Voilà toute la vérité. Et plus personne n’évoqua le sujet. Seules les personnes concernées connaissent cette histoire, vous entrez donc dans le cercle fermé des initiés.

En 1979, nous étions très loin de « l’arrêt Bosman » qui le 15 décembre 1995 déclara illégal le pouvoir unilatéral des clubs protégé par un règlement de la FIFA inique qui autorisait les clubs à bloquer un transfert pendant deux ans pour tout joueur qu’il soit professionnel, amateur ou junior. Donc à l’époque de l’arrivée de Lucien Favre à Neuchâtel-Xamax, cette clause accordait à Lausanne le droit unilatéral d’empêcher le transfert pendant deux ans.
Au vu de cette possibilité de blocage des Lausannois, Facchi et moi étions tombés d’accord pour que les conditions financières négociées soient garanties à Lucien par un contrat notarié qui spécifierait que le joueur, même non-qualifié, s’entraîne avec Neuchâtel-Xamax en attendant que la situation se débloque. Un marché que le Président neuchâtelois accepta sans discuter.

Nous étions donc à Genève, Lucien et moi face à Me Torello, mon avocat de l’époque, en train de rédiger ce contrat particulier lorsque le secrétariat du Lausanne sport nous informa que les dirigeants du club acceptaient de libérer Lucien contre les 150’000 CHF de dédommagement que Gilbert Facchinetti avait accepté. La teneur du téléphone était simple : « Soyez à 1700 heures à notre secrétariat pour signer la feuille du transfert ! »
Heureux de ce dénouement, nous avions sauté dans ma voiture pour rejoindre Lausanne au plus vite. Il pleuvait à torrent, les voitures se traînaient sur l’autoroute. Je pris la bande d’arrêt d’urgence pour remonter toute la file. Pour une fois Lucien avait mis sa ceinture de sécurité. Aujourd’hui une telle témérité m’aurait valu un retrait de permis éternel ! Lucien s’en souvient : c’est une certitude !

Gilbert Facchinetti était fou amoureux de son club, c’était un type formidable. Nous nous adorions. Nous étions les mêmes au niveau de la passion, de la franchise et de la générosité. Quelques mois avant que Facchi ne décède, il avait rencontré Mirco qui était l’un de mes proches. Après que ce dernier l’eut informé qu’il me connaissait bien, Gilbert lui aurait dit : « Ah Christian, ça, c’était un véritable manager comme il n’en existe plus aujourd’hui ! » En me racontant cette anecdote, Mirco me précisa : « en parlant de toi, Facchi avait les larmes aux yeux ! » Je fus très ému de cet hommage car je pense sincèrement que des types comme lui sont effectivement en voie d’extinction. Il s’est quasiment ruiné pour son club et ne fut pas épargné par la vie. Facchi, tous ceux qui l’ont connu s’en souviennent encore : il était apprécié de tous. »

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À 31 ans, en acceptant de devenir le conseiller personnel de Lucien Favre, il sera – là aussi – un innovateur en Suisse puisqu’il était le pionnier de ce job, mais en Europe aussi puisque ses méthodes anticipaient celles d’aujourd’hui. Sous sa férule, Lucien Favre deviendra le footballeur N°1 du pays au milieu des années 80 en étant aussi le plus médiatisé. Son management ne ressemblait alors à aucun autre.

Frédéric Chris explique dans cette biographie ses innovations perpétuelles en détaillant, preuves à l’appui, ses négociations secrètes qui monopoliseront tous les médias helvétiques de l’époque. Notamment celle qui permit à Lucien Favre de gagner, sur une saison, quatre fois les émoluments de Michel Platini qui venait de signer à la Juventus de Turin.
Parallèlement à son activité de manager, Frédéric Chris créera une « chaîne leader » de fitness en Suisse Romande avant de se retirer et se consacrer à la peinture. Exposant à Genève, il sera alors comparé à un extraterrestre. C’est à cette occasion que Christian Imbach deviendra Frédéric Chris.
Son parcours victorieux en tant qu’entraîneur puis de manager fut pourtant sujet à un harcèlement médiatique constant en raison d’une franchise sans limite qu’il ne pouvait réprimer : il ne savait pas se faire apprécier ! En fait, ce n’est qu’à l’âge de 62 ans, qu’une découverte inattendue a changé le cours de sa vie : il découvrit alors qu’il était porteur du syndrome d’Asperger ce qui lui permit de mieux comprendre certaines de ses réactions passées.

« À la suite d’une insolente carrière d’entraîneur à succès qui me valut d’être, pendant une quinzaine d’années, l’une des cibles médiatiques préférées de la presse nationale, je me rappelle la « Une » d’un quotidien genevois qui titrait : « Incompétent ou trop compétent ? » avec mon portrait qui trônait au milieu. Le rédacteur dudit article, un opposant qui ne supportait pas mon comportement anticonformiste et ma franchise voulait, par le biais de ce titre interrogatif, semer le doute sur mes capacités. »

« Fou ou Asperger ? » Telle était la question

« Quand j’étais gosse, si mes proches avaient pu détecter que j’étais un autiste Asperger, ils auraient voulu me soigner, m’aider afin de faciliter mon intégration sociale. Dans une certaine mesure tout aurait semblé plus logique, mais vu sous un angle plus objectif, leur volonté de bien faire m’aurait considérablement influencé et aurait rendu plus difficile, voire impossible, mon ascension professionnelle qui fut loin d’être « normale ». Car pour agir comme je l’ai fait, il fallait être excentrique, différent à l’extrême ou alors « complètement fou ! »

Le syndrome d’Asperger n’ayant été reconnu officiellement que dans les années 90, mon entourage ne pouvait pas savoir que mon comportement était pathologique. Il me fallut donc attendre 50 ans, à l’âge de 62 ans, pour mettre un nom sur cette « souffrance » qui finalement n’en fut pas une, tant ma passion pour le football m’a absorbé au point de m’éviter un parcours solitaire. Cela dit, pendant toute ma carrière, ignorant cette pathologie singulière, je me trouvais tout de même vraiment « cinglé », me rendant parfaitement compte que je n’étais pas comme les autres.
Ma façon d’agir ressemblait presque à un suicide annoncé tant j’affirmais haut et fort, dès ma douzième année, qu’il était inutile que j’apprenne un métier car « de toute manière je gagnerais ma vie par et pour le football ». Et ceci, à une époque où la majorité des joueurs de Ligue nationale suisse étaient des semi-professionnels et dont les meilleurs gagnaient au mieux un salaire de cadre supérieur !
Sur le plan de mes certitudes de réussir, je ressemblais complètement à Mbappé qui lui est un HPI (Haut Potentiel Intellectuel) – sous la haute surveillance de sa maman à l’école – tandis que moi, je suis porteur du syndrome d’Asperger, la version intellectuelle du haut niveau de l’autisme. Sur le plan de la communication, c’est clair que Kylian est au summum alors que l’Aspie que j’étais « noircissait le parquet ! » Quant à mes parents, ils ne se souciaient guère de ma scolarité pourvu qu’elle ne leur pose pas de problèmes. Donc inutile de préciser que gamin, je n’étais pas du tout pris au sérieux, même si au vu de la vitesse à laquelle je grimpais les échelons footballistiques, les opinions évoluèrent rapidement.

Hypersensible, impatient, impulsif, ma communication maladroite par rapport aux autres transforma le doute initial de mes nombreux détracteurs en rancœur qui pour certains, notamment au niveau des journalistes, s’avérera obsessionnelle. Dès lors, il était clair qu’au premier faux pas le « retour de bâton » se ferait sentir. Il le sera, mais malheureusement pour eux, chaque fois j’eus la capacité de rebondir et de retourner les choses à mon avantage.
Évidemment, il y eut des moments où je me suis posé des questions, notamment celle du rejet perceptible dont je faisais l’objet : pourquoi ne m’appréciait-on pas ? Pourquoi étais-je exclu alors qu’il me semblait que je luttais sans relâche pour pouvoir m’intégrer ? Pourquoi, chaque fois que je prenais la parole, on me lançait des « tu te prends pour qui ? », « tu veux toujours avoir raison ! » ou encore « tu te crois plus intelligent que nous ? »
Bon, après y avoir bien réfléchi, il me semble encore réaliste aujourd’hui de penser que 9 fois sur 10 j’avais raison étant donné que – passant mon temps à fuir les discussions banales ouvertes au débat – je n’évoquais que des problématiques qui me passionnaient, donc que je connaissais sur le bout des doigts. Il est clair aussi qu’en évaluant cette proportion, j’exclus ma période de gestionnaire où, privilégiant l’amitié au pragmatisme, mélangeant argent et affection, je reconnais – sans hésiter – avoir eu tort dans des proportions équivalentes.

Ma carrière d’entraîneur à succès insolente me valut d’être, pendant une quinzaine d’années, une des cibles médiatiques préférées de la presse nationale. Je me rappelle notamment une « manchette » d’un quotidien genevois qui titrait : « Incompétent ou trop compétent ? » avec mon portrait qui trônait au milieu. Le rédacteur dudit article, un opposant qui ne supportait pas mon comportement anticonformiste et ma franchise, voulait par le biais de ce titre interrogatif, semer le doute sur mes capacités. Nous étions en 1981, j’étais alors le manager personnel de Lucien Favre, le meilleur footballeur du pays tout en assumant la responsabilité du secteur jeunesse du FC Servette.
En fait, le titre provocateur de cet article fut pour moi le plus bel hommage qu’on puisse me faire étant donné que même le pire de mes détracteurs n’a jamais imaginé une seule seconde que je puisse être incompétent à la lumière de mon parcours et des succès rencontrés. Dès lors, l’hypothèse d’incompétence devenant peu crédible, ce « journaleux » admettait malgré lui – en avançant que je pouvais être « trop compétent » – que ma vision d’un football sortant de l’ordinaire relevait d’une innovation complètement avant-gardiste. Comme quoi, un esprit mal intentionné peut sans le vouloir dire du bien de vous !

Personnellement, je pense que ma plus grande chance – que je considère être une destinée – fut que les circonstances de la vie m’aient guidé naturellement vers le football. Ce sport, collectif par définition, m’évita de connaître les affres des autistes Asperger trop souvent enfermés dans des passions solitaires. Le football fut donc un véritable refuge, une sorte de giron affectif qui remplaça ma propre famille.
Dès l’âge de 14 ans, je mangeais et dormais à la maison, je passais le week-end chez ma grand-mère, mais hormis cela mes parents ne me voyaient guère. Quant à ma scolarité, je la gérais seul et comme il n’y avait pas de problème, ils ne s’en sont jamais mêlés. Il est clair que mon caractère bien trempé fit que mon acceptation par les autres fut avant tout hiérarchique puisque j’ai toujours assumé une position de « leadership » dans ce sport.

La faculté naturelle de l’Aspie à comprendre très rapidement l’ensemble d’un problème est souvent annihilée par son inaptitude à le gérer simplement. Assimiler trop vite est certes un avantage mais un gros handicap social dès lors que c’est mal perçu par les autres : une personne qui a trop souvent raison provoque inconsciemment de la gêne, voire de la vexation chez son interlocuteur. À cela s’ajoute l’excès de franchise propre aux autistes. Ce qui n’était au départ qu’un simple rapport de camaraderie peut alors devenir conflictuel à cause d’une phrase maladroite.
L’exclusion découle de ce genre de situation qui est un véritable cercle vicieux. En effet, souhaitant éviter ce genre de déconvenue, je préférerais m’isoler pour retrouver mes repères avec mes journaux, mes activités sur mon ordinateur ou encore une personne apte à me comprendre. C’est ce que j’ai toujours fait, évitant petit à petit de me joindre aux autres dès l’instant où je pensais que nous n’allions pas nous entendre.

Problème supplémentaire pour le passionné excessif que je suis, il ne maîtrise pas du tout « l’art de la concision. » C’est un fait ! D’autant plus que sur des sujets qu’il connaît parfaitement, souhaitant être tellement précis et complet dans ses explications, il accumule mille détails superflus au point de fatiguer légitimement son interlocuteur. Ce dernier finit donc par lui couper la parole sans le laisser aller au bout de son raisonnement. Une interruption qui lui fait, la plupart du temps, perdre le fil de son explication et le frustre au point qu’une discussion amicale peut s’éteindre ou dégénérer brusquement. À tête reposée, bien évidemment il trouve ce comportement incongru, mais sur le moment il ne le maîtrise pas.

Dans mon quotidien, le moindre imprévu me contrarie : donner un simple appel téléphonique ou remplir un formulaire me stresse au point de m’épuiser ; je suis maladroit de mes mains, le moindre bricolage se transforme en véritable catastrophe ; mes difficultés d’élocutions me mettent mal à l’aise : j’estropie les noms, je les confonds et de plus, je ne suis pas du tout physionomiste.
À l’école déjà, j’étais très mauvais en grammaire et nul en orthographe. Lors de la remise de nos dictées corrigées, mon cahier était toujours sous la pile. C’était toujours le mien qui était rendu en dernier ! À l’adolescence, c’est grâce à ma passion d’archiviste sportif que j’ai pu améliorer mon écrit sans que ma prose ne sorte du lot pour autant. Je travaillais depuis mon enfance sur une documentation footballistique continuellement mise à jour. À l’époque, je connaissais quasiment tout sur l´univers du football. Je pouvais réciter les dates de naissances des grands joueurs, évoquer leur nombre de sélections. Ma passion était telle que j’étais une vraie encyclopédie footballistique. Mes archives étaient largement supérieures à celle de « la Semaine Sportive », le journal dont j’étais un correspondant majeur.
Au niveau de la compétence, je brillais pour une bonne et simple raison : je parlais vrai, sans détour, et n’abordais que des sujets footballistiques que je ne maîtrisais parfaitement. Et « cerise sur le gâteau » je parle fort comme la plupart des autistes : un énorme handicap en société mais néanmoins très utile lorsque sur le terrain, ou le long de la ligne de touche, je dirigeais mes équipes de football. Là on m’entendait à coup sûr !

Beaucoup de génies sont des Autistes Asperger. Dans ce cas, le handicap se transforme en « compétence particulière », une source de succès qui les éloignent de la solitude promise à cette pathologie. C’est clair que sans passion lucrative ou affective à se raccrocher – ou encore sans échappatoire pour s’exprimer – la grande majorité des Aspies sont vulnérables s’ils n’ont pas les ressources psychiques et mentales nécessaires pour s’en sortir. Une situation particulièrement délicate pour les adolescents qui peut les conduire au suicide alors même qu’ils bénéficient de facultés intellectuelles et mentales très supérieures à la moyenne. Près d’un tiers de ceux-ci tenterait de se suicider si l’on en croit certaines études spécialisées.

Sur le plan affectif, un Aspie, s’intéresse plus à la personnalité d’une personne qu’à son genre. Son besoin d’indépendance exacerbé et sa faible ouverture au compromis le rendent difficilement gérable et, de fait, peu enclin à une vie de couple.
L’Aspie, comme la plupart des autistes, est fondamentalement honnête et peut pécher par naïveté. C’est ce qui m’arriva lorsque je suis rentré – par la force des choses – dans les affaires : imaginatif, novateur, j’étais un créateur hors pair lorsque cela touchait mes domaines de prédilection ou encore pour ceux que je défendais « bec et ongles ». J’étais alors un redoutable négociateur alors qu’en revanche, comme gestionnaire, j’étais nul : cela ne me passionnait pas du tout.
Comme souvent chez les Aspies, continuellement à la recherche d’affection, ma franchise abrupte constitua un handicap permanent : on me supportait parce que j’étais le meilleur mais on ne souhaitait pas que je le sois ! On m’écartait volontairement de certaines réunions, on jasait sur moi, on se moquait de celui qui voulait toujours avoir raison. Il est clair que ma façon d’agir était le meilleur moyen pour me retrouver seul. J’étais en constante recherche d’amitié plutôt que de simple copinage : une équation du bonheur impossible !

Lorsque la quarantaine arriva, devenu un entrepreneur visible n’ayant jamais rien économisé, mon train de vie princier laissait penser que je possédais une fortune. En réalité, parti de rien, j’avais investi tous mes revenus dans des entreprises qui couvraient mes besoins. Certes, j’en étais le patron incontesté, mais je ne possédais rien à titre personnel. À leur grand désarroi, les « rapaces » qui tentèrent de me dépouiller ont donc découvert avec dépit qu’ils couraient après un magot inexistant.

Cette biographie met en évidence l’idée que la différence, symbolisée par le syndrome d’Asperger, peut être une source d’innovation et de détermination, même dans les domaines les plus traditionnels dont le milieu du football est une référence.»

Réflexion sur un parcours improbable mais bien réel !

Frédéric Chris réfléchit sur sa vie en tant qu’adulte Asperger, se demandant comment sa vie aurait été différente si son entourage avait su détecter sa condition pendant son enfance. Il évoque la difficulté d’être un enfant Asperger sans le savoir, ce qui l’a amené à être perçu comme excentrique ou « complètement fou ». Il aborde dans cette biographie toutes les étapes de cette ascension irrésistible qui le mena au sommet. Il livrera tous ses secrets d’entraîneur, de journalistes, de manager et même ses souffrances intimes en vous laissant juger si ce visionnaire le fut ou pas !
Il explique comment son obsession pour le football l’a absorbé et a contribué à sa réussite professionnelle en évitant qu’il ne souffre de solitude, le lot habituel d’une grande partie des adolescents Asperger. Il compare son profil Asperger à celui de Kylian Mbappé, qui est un Haut Potentiel Intellectuel (HPI) et souligne ce qui les rapproche lorsqu’ils étaient jeunes ou les différencie, notamment en matière de communication. L’un est social et l’autre pas du tout.

Frédéric Chris revient sur son parcours académique, où il était souvent mal compris et exclu en raison de son comportement. Son honnêteté brutale et son incapacité à compromettre ont créé de graves divergences. Il discute de son succès en tant qu’entraîneur de football et des critiques médiatiques qu’il a suscitées en raison de son comportement non conventionnel. Pour lui, la passion pour le football fut un refuge qui remplaça sa propre famille.
Il décrit également les caractéristiques typiques de l’Asperger, notamment la difficulté à gérer les interactions sociales, l’hypersensibilité, et l’obsession pour les sujets qui l’intéressent. Il explique aussi comment son incapacité à être concis et sa tendance à accumuler des détails superflus ont compliqué ses interactions sociales. Il évoque enfin les challenges liés à sa condition, notamment les difficultés dans la gestion financière et la nécessité de trouver des personnes qui le comprennent.


« Son Étoile » plutôt qu’un Dieu :

Frédéric Chris partage une expérience personnelle liée à une bande dessinée de Tintin, « L’Étoile Mystérieuse » qu’il a reçue en cadeau à son admission au collège à l’âge de 12 ans. Ce cadeau l’a marqué. Ne croyant pas du tout à un Dieu unique qui ne s’occuperait que des hommes, il pense que des forces spirituelles guident chacun d’entre nous et nous incitent à rechercher la vérité envers et contre tous.
Sa préférence pour le bouddhisme est évidente, car il trouve cette philosophie plus tolérante que des religions monothéistes mortifères. Il croit à l’immortalité de l’âme, souligne que chaque être vivant, y compris les animaux, a un destin qui lui est propre. Il aborde également la notion de forces mystérieuses qui, selon lui, dirigent l’univers au-delà de toute compréhension humaine et croit à la notion d’une destinée pour chacun d’entre nous dès lors que celui qui en est investi est capable d’en tirer le meilleur parti.

Lutte contre l’Homophobie dans le Football

Frédéric Chris relate, parmi d’autres, une expérience marquante dans un vestiaire lorsqu’il fut témoin d’un acte d’homophobie choquant où un joueur fut cruellement déstabilisé révélant de fait un problème persistant dans le milieu du football. Frédéric Chris prit donc différentes initiatives afin de détourner l’attention et recentrer l’équipe sur le match en valorisant indirectement la victime.

Frédéric Chris souligne dans cet ouvrage, l’importance de lutter contre l’homophobie dans le sport, car elle est la principale cause de suicides chez les adolescents homosexuels. Il exprime donc sa totale solidarité envers ceux-ci et rappelle que le football, comme tous les sports d’ailleurs, doit être un terrain de prédilection de la tolérance à l’égard de toutes les discriminations.
Il constate d’ailleurs qu’aujourd’hui – alors que la fin du 20ème siècle semblait des plus prometteurs sur le plan des avancées des libertés humaines – l’homophobie plus que jamais reprend du terrain sur des plans qu’on croyait perdu à jamais.

CR7 ambassadeur de l’Arabie Saoudite ???

« Admirateur pendant de longues années de Cristiano Ronaldo, j’espérais qu’en fin de carrière, il mette un grand coup de « pied dans la fourmilière » en révolutionnant cette « omerta du non-dit ». Finalement, il préféra devenir, en 2023, ambassadeur de la répressive Arabie saoudite pour gagner des millions dont il ne saura que faire tant il en a déjà ! Que dire de pire ?
Après la finalisation de son récent transfert en Arabie saoudite, Neymar, qui touchera lui aussi une fortune pour promouvoir cet état « paradisiaque » a insisté sur le fait que Cristiano Ronaldo avait initialisé un « magnifique » engouement pour cette destination exotique. Karim Benzema, N’Golo Kanté ou autre Jordan Henderson ont suivi et il y a fort à parier que nous verrons de plus en plus de joueurs rejoindre « la Pro League saoudienne » dans les années à venir. L’argent n’a pas d’odeur au point que ce royaume demande que son futur champion soit accueilli en « Champions ‘League » ce qui constituerait une ultime injure aux défenseurs des droits humains.
Bien évidemment, Mbappé n’a pas salué son ex-coéquipier pour son choix. Pas un post. Le silence radio. Lui qui aurait pu – en acceptant d’y aller une seule année avant de partir libre – de devenir milliardaire à 25 ans ! En refusant d’entrer en matière, Mbappé prouve qu’il y a encore des champions qui ne placent pas l’argent en priorité.

L’ONG « Human Rights Watch » révéla qu’entre mars 2022 et juin 2023 des centaines d’immigrants (femmes et enfants compris) furent massacrées à la frontière saoudienne. Des faits mortifères passés quasiment sous silence par une communauté internationale paralysée par ses besoins énergétiques issus de la guerre en Ukraine. Une impuissance occultée par l’arrosage d’une foule de footballeurs aveuglés par des centaines de millions de dollars tombés du ciel qui ne fait qu’augmenter la déstabilisation d’un marché des transferts international qui ressemblait déjà à du « n’importe quoi ».
Le non-respect des droits de l’Homme reproché au royaume saoudien reste tout de même une épine dans le pied du soft power saoudien : à chaque affaire de ce genre, le côté sombre de l’Arabie saoudite ressurgit. L’argent facile distribué à des stars « vénales » étant devenu la face la plus soft du système, il est évident que ceux qui s’enrichissent en faisant la promotion d’un tel régime se salissent entendu que les plus fortunés sont les plus critiquables.
Certes, la société saoudienne se libéralise un peu ces dernières années avec quelques ouvertures envers les femmes sans pour autant cesser ces exécutions qui ne cessent d’augmenter depuis le règne de MBS, son prince héritier. Toute opposition au pouvoir est lourdement sanctionnée. Les exécutions approcheraient la centaine chaque jour suivant les ONG attentives à ces abus.

Comme paravent, il est clair que le football, sport roi médiatique par excellence, est le plus sollicité. Dès lors, comment éviter que la FIFA, son instance faîtière, ne soit mise en cause. Pour ne citer qu’un « minuscule » exemple de cette ineptie, comment comprendre que la FIFA se montra incapable, lors du « Mundial 2022 » au Qatar, d’assumer une défense minimale de la communauté LGBT qui consistait à autoriser le port d’un brassard « arc-en-ciel » pour les capitaines d’équipe qui le souhaitaient ? D’autant plus que l’article premier de ses statuts – qui interdit toutes discriminations quelles qu’elles soient – le lui imposait ! C’est clair, que si un acte aussi minuscule ne peut être imposé par la Fédération la plus importante au monde, comment espérer que la communauté internationale fasse plier un régime qui détient une part prépondérante de l’énergie planétaire.
Cela dit, comment trouver acceptable que ce Président « soumis » bénéficie impunément d’avantages personnels de la part d’états arabiques sans qu’il ne s’en cache ? Il y eut une époque où une qualification plus sévère aurait pu être engagée lorsque l’ONU pouvait encore agir pour défendre les droits de l’homme. D’autant plus que l’influence d’une telle fédération sportive pourrait être décisive dans un monde de plus en plus autocrate, ne serait-ce qu’en privant ces régimes mortifères de l’énorme propagande planétaire générée par le sport et ses événements.

Lorsque nous évoquons la loi du nombre, nous devons travailler à ce qu’elle ne devienne pas la loi du plus fort. Si les artistes sont en première ligne dans leur devoir d’exemplarité et qu’ils se doivent de faire évoluer les mentalités, il est évident que le sport doit répondre aux mêmes exigences. Le football a indéniablement ce devoir de responsabilité puisqu’il est le plus populaire et le plus retransmis. Une telle médiatisation implique à ses dirigeants des obligations éducatives au-delà de toutes les frontières. En tout cas en ce qui concerne les droits humains, notamment la communauté LGBT l’éternel bouc émissaire en cas de crise. L’une des responsabilités majeures de ces fédérations est d’éradiquer l’homophobie qui martyrise des centaines de millions d’innocents ou au mieux à les plonger dans la solitude.
C’est d’autant plus injuste que par leur sensibilité différente, la grande majorité de ces victimes sont des personnes de consensus, souvent novatrices et particulièrement tolérantes. Si les femmes et hommes homosexuels ou bisexuels qui se dissimulent – pour des raisons compréhensibles vu les pressions qui pèsent sur eux – sortaient du bois, on s’apercevrait que l’hétérosexualité – certes reste majoritaire – mais que l’homosexualité combinée avec les sexualités ambivalentes représente certainement beaucoup plus que ce que les statistiques publiées.

Aujourd’hui, s’il fallait estimer une proportion proche de la réalité des membres LGBT dans le monde, un quart des êtres humains sur la planète semble réaliste. Un nombre équivalent à la population de la Chine et de l’Inde réunies ou encore à l’Afrique tout entière. Quoi qu’il en soit lorsqu’on parle de 2 milliards ou même de 800 millions d’individus – pour reprendre ce fameux 10 % officiel – peut-on toujours parler de simple minorité ? Peu importe le chiffre de toute manière, que ce soit le 5ème ou le quart de la population de la planète, il me semble plus que nécessaire que cette forte minorité soit défendue avec détermination. Et les artistes, dont les sportifs font partie, se doivent d’investir dans ce combat crucial pour la liberté des droits humains qui restent le premier article de tous les statuts démocratiques. »

Quand la pudeur règne, le silence est assourdissant

Dans un contexte où les centres de formation et les écoles de football n’existaient pas, Frédéric Chris aborde son parcours intime avec franchise à une époque où l’omerta familiale sur la sexualité faisait qu’il ignorait l’existence même de l’homosexualité ! Ce n’est qu’après son service militaire, qu’il commença à s’interroger sur ses préférences sexuelles.
Son obsession pour le football l’éloigna des questions liées à la sexualité pendant toute sa jeunesse. Son aisance naturelle dans un environnement masculin l’avait naturellement éloigné des relations avec les filles. À cela s’ajoutaient, les difficultés d’interaction avec les autres, dues au syndrome d’Asperger dont il était porteur sans le savoir, ce qui compliquait considérablement sa vie sociale. Comment s’en est-il sorti ? Frédéric Chris se confie sans tabou en faisant part de ses interrogations, de ses actes et surtout de ses conclusions.

Face à l’amitié, le fléau de l’argent !

Devenu entrepreneur, Frédéric Chris décide de vivre une sorte de seconde adolescence à l’âge de 36 ans, une vie qu’il avait sacrifiée pour poursuivre sa carrière sportive. Après avoir quitté le monde du football, il se retrouve à gérer plusieurs entreprises, dont des salles de sport, avec ses amis proches. Son optimisme naturel et sa confiance dans sa capacité à résoudre les problèmes le conduisent à ignorer les réalités financières qui risquèrent de le mener au désastre. Il reconnaît n’avoir jamais eu l’âme d’un gestionnaire, sauf quand il défendait les intérêts de ses joueurs. Soulignant l’importance de l’amitié, il se questionne sur sa générosité excessive qui, finalement, était mal interprétée. Longtemps, il se considérait comme comblé mais comprit que tout cela était illusoire lorsqu’un accident de vie le fit chuter de son piédestal.

« Après une carrière dans le football, le management, puis la création de sociétés, me voici devenu artiste… »

Le Cervin. Symbole d’un espace de liberté sans limite.

Une œuvre de Frédéric Chris exécutée en 2001

ARTISTE INNÉ BIEN NÉ

2021 Verbatim. Frédéric Chris

« 2021. Là, après avoir fait une œuvre appelant au départ du cataclysmique Trump, j’en étais à me désespérer du chaos orchestré par le trio satanique composé du Russe, de l’épisodique cauchemardesque brésilien et l’inévitable Mandarin devenu impérissable qui, tous les trois, en appellent à l’éradication des minorités dont la communauté LGBT qui, chaque fois que le chaos s’installe, se retrouve en première ligne… »

La famille Gagliardi, organisatrice de l’exposition et, à droite, Frédéric Chris

2003 Le sourire de Salva par Frédéric Chris

2002 La Planète rouge. Frédéric Chris

2002 Les envahisseurs. Frédéric Chris

2002 Météorites. Frédéric Chris

Même Serge Ribordy était là en famille. Il m’a dit le plus sérieusement : « C’est toi qui est l’agent de ce peintre ? » Avant que je ne lui réponde : « Non, le peintre, c’est moi ! »

Mon ami Alain et la maman de Daniel.

2004 : À la réception de la Banque Raiffeisen

2002 Cléopâtre. Frédéric chris

2001 Atlantide. Frédéric Chris

2002 Le Roi Soleil. Frédéric Chris

2001 Beethoven. Frédéric Chris

2002 Armada. Frédéric Chris

Et pourtant Ben Laden, je ne l’ai jamais rencontré !

« À l’âge de 12 ans, alors que j’avais fait étape au collège pendant quelques mois, la peinture et les grands peintres étaient l’une de mes passions. Une fois par semaine, je me rendais chez ma professeure de peinture, une dame très gentille qui armée d’une patience infinie répondait à toutes mes questions. Ses réponses finissaient systématiquement dans mon cahier aux pages quadrillées qui petit à petit était devenu un vrai lexique spécialisé !

Curieusement, à l’époque j’adorais Gauguin. Peut-être que ses visages sans finesse et ses couleurs fortes et bariolées me rapprochaient de lui intuitivement. C’était comme si nous ressentions la même chose, comme si nous nous comprenions sans nous connaître. Lui aussi jouait avec les couleurs, et son dessin très imparfait ressemblait à ce que je savais faire. Gauguin semblait peindre comme un enfant, mais chacun de ses tableaux respirait la Polynésie. Aujourd’hui mes rêves sont bien différents, exilé les îles paradisiaques et adieu Gauguin, ce serait plutôt Dali qui m’épate.

Un jour j’ai eu l’inspiration de dessiner mon idole Raymond Kopa grandeur nature. Mon œuvre trônait sur le mur à côté de mon lit. Je m’étais appliqué, notamment sur les mensurations, je regrette de ne pas l’avoir conservée. Je me souviens l’avoir déchirée lorsque j’ai voulu remplir ma chambre de posters de mon footballeur préféré. C’est ainsi, à 12 ans on ne garde rien !

 J’adorais peindre. Sur mon balcon les Alpes s’offraient à moi au point que je multipliais les paysages. Paradoxalement, allergique aux précisions géométriques – donc incapable de dessiner finement, notamment les visages – en revanche, les contrastes colorés, les graphismes spectaculaires et les représentations aux couleurs vives me stimulent. Dans ce domaine, j’excelle et innove sans cesse au gré de ce qui se passe dans ma tête. Dès lors, j’ai toutes les peines du monde à mettre en ordre de bataille toute mon inspiration qui s’exprime de manière anarchique. Je concède que la concision n’est pas du tout ma spécialité et pas seulement dans le domaine de la peinture !

 Sur mon palier vivait un vieil homme qui était un véritable peintre. Je lui rendais régulièrement visite, fier de lui montrer mes peintures, et impatient d’avoir ses critiques éclairées. Un jour, je lui en présentai une et lui dis :

–   C’est le paradis !

Voyant une tache blanche sur la toile, il me demanda :

–   C’est quoi cette tâche ?

Je n’avais pas prêté attention à cette éclaboussure, je fus donc surpris mais je lui répondis spontanément :

–   C’est le bon Dieu qui descend en parachute !

Cela ne l’amusa pas, il n’esquissa même pas un sourire :

–   On ne rit pas avec le bon Dieu mon petit !

Sa réaction me laissa d’autant plus pantois que j’étais fier de ma drôlerie. C’était la première fois que j’étais confronté à l’intolérance d’une représentation artistique ! Il était pourtant catholique, alors le caractère divin de mon paradis aurait dû l’interpeller. On se serait cru au pied du Jura que surplombaient des nuages célestes.

 Décidé à gagner ma vie grâce au football, le choix d’un métier était le cadet de mes soucis. À 16 ans, lorsque l’heure du choix fut arrivée, je fis un tri par ordre de préférence. Comme j’adorais peindre, je jetai mon dévolu sur un apprentissage de dessinateur sans véritablement prendre conscience de la technicité de mon choix.

C’est lorsqu’on tenta – vainement – de me faire aligner des « A » comme à l’école maternelle que j’ai commencé à m’interroger ? Un, deux, trois, je voulais bien, mais des pages entières, il ne fallait pas exagérer. Et ce n’était que le début, car ce choix hasardeux de dessinateur en machines me confrontait au sommet de ce que je déteste le plus, à savoir la technique.

 Je me suis remis à la peinture un demi-siècle plus tard. En 2001, lors de ma retraite anticipée au Brésil. Une peinture que j’avais exécutée à l’âge de 12 ans m’est revenue à l’esprit. Il s’agissait d’une représentation de New York la nuit qui m’avait valu un premier prix au collège. J’ai donc demandé qu’on aille m’acheter une toile et de la peinture.

Face à ma toile, j’ai aligné la baie d’Hudson, le pont de Brooklyn, la statue de la Liberté, l’Empire State Building et des Twin Towers soit une vue d’ensemble impossible à photographier puisqu’en réalité ces monuments ne se regroupent pas au même endroit. Bref, une fiction sur fond lointain d’un magnifique coucher de soleil et d’une pleine lune immaculée. Étant donné que cinquante années m’avaient éloigné des pinceaux, je regardai ma reproduction avec une certaine désillusion. Je la trouvai fade, simpliste, bref pas du tout géniale. Soudainement, j’eus un flash : une éclipse solaire !

Il me fallait une lune noire qui cacherait le soleil, New York en pleine nuit sur fond rougeoyant avec son reflet dans la baie. Voilà on n’y était presque, mais ça manquait encore de punch, car j’ai horreur des natures mortes ! Je m’emparai donc de la bombe de peinture en spray que j’avais sous la main et je taguai le sommet de mes plus beaux gratte-ciels. Cette fois c’était bon, j’étais enfin fier de moi. J’ai exposé mon œuvre dans mon salon et j’invitais chaque invité à le contempler.

Au début, je peignais devant mon salon, entouré de mes quatre chiens

Quatre mois plus tard, Al-Qaïda faisait s’écrouler les deux tours du World Trade Center. Cette fois les bombes étaient des Boeings. Pour les États-Unis à défaut d’une lune c’était une page noire de son histoire qui se tournait. Prémonitoire ? En tout cas le tableau est toujours dans mon salon et ceux qui l’ont vu peuvent en témoigner : lors des attentats j’étais au Brésil avec mes Rottweilers, mon whisky Lagavulin, internet et mes toiles. Et Ben Laden n’a jamais fait partie des gens que j’ai rencontrés !

2002 Pyramides. Frédéric Chris

Au Brésil où je séjourne souvent, il est aujourd’hui courant que vers 2 ou 3 heures du matin, il me prenne des lubies créatives. Dès lors, je sors une toile, mon matériel et je m’éclate ! Au début du 21ème siècle, entouré de mes 4 chiens, je peignais ce qui me passait par la tête. Le lendemain, Nedge – l’épouse de Valdoir – arrivait, elle appelait son mari et s’exclamait : « Viens, regarde ce que Chris a fait ? ». Au gré de mes humeurs, Cléopâtre défilait avec des dauphins, les Martiens débarquaient, E.T. s’invitait régulièrement ou la 7ème flotte traversait les ouragans. En fait je ne peignais pas, je jouais avec les couleurs en projetant ce que mon esprit m’inspirait : l’univers, les pyramides, les sciences occultes, l’infini, les extraterrestres, bref rien de très terrien. C’était curieux et spectaculaire, mais ça correspondait bien à mes inspirations du moment quelque peu désinhibées par mon whisky préféré.

 J’étonnais tous ceux qui découvraient mes tableaux tant mes œuvres étaient déjantées et au style unique ! J’ai même une carte officielle d’artiste au Brésil, si si c’est authentique ! Au point que tous ces compliments m’ont poussé à organiser un vernissage à Genève. Une fois de plus j’étais considéré comme un extraterrestre ! »

Ensuite, je me suis construit un vrai atelier…

SUR LES TRACES DE KOPA !

2001 Le clown volant. Frédéric Chris

« Mon instituteur gratifiait régulièrement la classe d’un « Arrête de faire le singe ! » à mon encontre. Il devait sûrement ignorer que tous me surnommaient Kopa, mais encore l’aurait-il su, il n’aurait pas compris la référence étant donné qu’il n’y connaissait rien au football. Pour lui, j’étais le petit singe de la classe, et tout comme mon idole j’étais petit, vif, intelligent et avais toujours bonne mine. La mine, parlons-en ! C’est au fond de celle-ci que le jeune Raymond Kopaszewski a commencé à travailler, aux charbonnages de Nœux-les-Mines, dans le nord de la France. Il y laissa une phalange de l’index gauche dans un accident du travail. Il avait 14 ans. Seul le football pouvait le sortir de cet enfer. Il en accepta donc les sacrifices alors qu’à ses côtés des « Jean-Pierre » plus talentueux ne firent aucun effort : Ils finirent, pour la plupart, au fond du trou. Kopa fut le meilleur joueur français avant Platini, Zidane et aujourd’hui Mbappé. »

KOPA, défenseur du droit des footballeurs

« C’est sur ce point du règlement – qui entravait complètement la liberté des joueurs – que Kopa, en 1963, c’était insurgé en faisant la « une » des journaux en déclarant : « les joueurs sont des esclaves ! » ce qui lui valut 6 mois de suspension avec sursis. En froid avec la FFF, il avait déjà mis fin à sa carrière internationale. Kopa avait du caractère et défendait les autres ! Il fut d’ailleurs vice-Président de l’UNFP (NDLR : le syndicat des joueurs) dont Just Fontaine, meilleur buteur de la coupe du monde 1958 – son coéquipier en équipe de France – deviendra une figure prépondérante. »

De la mine au paradis

« Comme Kopa ou Mbappé, je voulais être celui qui arriverait au sommet de ce sport, mais en Suisse le football professionnel était à ses débuts. Les joueurs étaient des amateurs voire des semi-professionnels. À titre de comparaison, à la même époque, en France les footballeurs professionnels gagnaient un salaire qui, pour certains, ne dépassait pas le SMIC (NDLR : salaire minimum moyen).

Adolescent, je mouillais donc le maillot dans cette décennie où le football était principalement un loisir. Une époque où les joueurs – qu’ils soient professionnels, semi-pros, amateurs ou même juniors – ne pouvaient pas être transférés sans l’accord du club qui possédait leur licence. Sans entente réciproque, le joueur était coincé avec un « préavis » de 2 ans ! C’est sur ce point du règlement – qui entravait complètement la liberté des joueurs – que Kopa s’est insurgé en 1963. Il fit la une des journaux en déclarant haut et fort que « les joueurs sont des esclaves ! ».

Une protestation qui lui valut une menace de 6 mois de suspension. En froid avec la Fédération Française de Football, Kopa avait déjà mis fin à sa carrière internationale. Il avait du caractère ce descendant de Polonais et s’employait à défendre les autres. Il fut d’ailleurs vice-Président de l’UNFP (le syndicat des footballeurs professionnels évoluant en France) dont Just Fontaine, le meilleur buteur de la coupe du monde 1958 et son coéquipier en équipe de France, deviendra une figure prépondérante.
Sa déclaration médiatique fut donc l’un des éléments déclencheurs de rébellions futures, comme l’arrêt Bosman qui instituera les « contrats à temps » à la fin desquels les joueurs devenaient libres de choisir leur club, instaurant L’ère des managers qui abusent de leur pouvoir aujourd’hui.

Tout ceci afin de situer les choses et expliquer que le football n’était pas alors un sport de millionnaire, malgré des années glorieuses où certes, quelques stars le devinrent, mais c’était vraiment le haut du panier. Ce ne sera que dès les années 80 que les prix prirent l’ascenseur pour atteindre aujourd’hui des chiffres dépassant l’entendement. De nos jours, 90 % des joueurs qui évoluent en première division des grands championnats européens sont multimillionnaires, voire milliardaires pour ce qui concerne le duo magique Messi-CR7. Mbappé et autres Haaland devraient en toute logique suivre leurs pas.

Mbappé l’a d’ailleurs officiellement reconnu lors d’une interview sur la Radiotélévision Suisse, face à Darius Rochebin, alors qu’il n’était encore qu’adolescent : « C’est vrai que c’est indécent mais c’est le marché qui est comme ça et c’est le monde du football qui marche comme ça. Je ne vais pas révolutionner le football. Je suis dans un système, il faut savoir le respecter et rester à sa place aussi. »

Les grandes « Superstars » actuelles ne volent rien en touchant des centaines de millions. Ces revenus sont simplement la conséquence de l’offre et la demande. Ses « étoiles » rapportent plus d’argent aux clubs que les sommes qui leur sont offertes. Les vrais bénéficiaires de ces salaires indécents sont les joueurs moyens. Eux sont souvent trop bien payés pour un talent accessible à beaucoup et, trop souvent, grâce à des managers influents qui se trouvent au bon moment au bon endroit. Ceci n’ôte rien à leurs efforts, car pour gagner de l’argent dans le sport il faut savoir souffrir et faire des sacrifices que les gens ne peuvent imaginer. »

« Lorsqu’il débarqua à Madrid, auréolé de son prestige, Kopa se comporta comme la vedette qu’il était jusqu’à ce qu’Alfredo Di Stefano lui fasse comprendre qu’il ne fallait pas lui tirer dans les pattes : j’ignorais à l’époque, que 15 ans plus tard, je finirais par le rencontrer, le monumental Don Alfredo ! »

Au service de l’homme le plus riche du monde

« J’entrai donc dans la troisième période de ma vie, celle d’un homme d’affaires, d’un homme libre en fait. Jusqu’alors, considérant ma notoriété nationale et l’homophobie implacable qui régnait – et règne encore malheureusement – dans le milieu du football, je fus obligé d’observer une longue période d’ascétisme sans laquelle ma carrière professionnelle aurait explosé en vol. Je n’avais guère le choix, mais avec le recul, je n’ai aucun regret. En effet, devenu indépendant, j’ai pu me convertir aux joies de la vie dans des conditions que peu de gens ont eu l’opportunité de connaître. En ce sens, j’ai eu de la chance malgré quelques épreuves inévitables mais nécessaires pour progresser.

 Après m’être rendu compte que je collectionnais un nombre impressionnant des spécificités d’autiste Asperger, je pris enfin conscience que ce sont précisément certains de ces comportements qui me permirent cette ascension aussi rapide que spectaculaire. Il est clair qu’un « Neurotypique » (NDLR : personne normale) aurait été moins rebelle, moins agressif, moins excessif, moins culotté, bref moins tout en fait ! Bien souvent pour réussir il faut être complètement fou et lutter contre une normalité qui est rarement novatrice. C’est un avantage indéniable des gens différents.

La grande majorité des génies sont des gens hors de la norme qui pour la plupart peinent à s’adapter socialement parce que trop enclin à se consacrer entièrement à leur sujet de prédilection qui est de fait une vocation. Ce sont chez les savants, ou autres innovateurs, que l’on retrouve les esprits les plus torturés. Et très souvent, ces innovateurs sont des Aspies qui s’ignorent.

Plus jeune instructeur de football de mon pays, directeur sportif et entraîneur professionnel d’un club de Ligue Nationale à 27 ans, j’ai mis fin à mes activités sportives dix ans plus tard pour me consacrer à d’autres occupations et assumer mes fonctions de manager de Lucien Favre. Les temps où on me surnommait Kopa, puis celle qui me valut d’être comparé au « Mago » Helenio Herrera étaient révolus.

 Dans le monde du football et du sexe, tout se coupe et se recoupe. Alors que l’essor de mes affaires grandissait, ne me laissant que peu de temps pour me disperser, j’eus recours aux petites annonces afin d’engager une gouvernante. La maison que ma banque allait me financer était une merveille au point que les villageois considéraient qu’elle était l’une des deux « crâneuses » du village : elle dominait le Lac Léman et les Alpes qui régnaient sur la Savoie. Il me fallait donc une gouvernante pour régner sur ce qu’il faut bien appeler un « caprice empirique ». Un caprice pour ma part, mais plutôt qualifié d’excès de richesse pour la majorité des gens qui ignoraient tout de mon fonctionnement.

À la recherche d´une perle rare, je mis donc une annonce de cinq lignes et finis par engager une petite dame autour de la cinquantaine qui me paraissait être de toute confiance. Elle commença donc à organiser l’intendance de la propriété quand malheureusement elle tomba subitement malade au point qu’elle ne put plus assumer le service pour lequel elle avait été engagée. Il me fallut donc tout recommencer, je repartis donc pour un tour à l’aide des petites annonces !

Le premier coup de fil que je reçus fut celui d’une femme hystérique qui hurlait tellement fort que je dus éloigner le combiné de mon oreille pour pouvoir comprendre ce qu’elle disait. Elle ne trouvait pas normal que je ne sois pas marié après qu’elle me l’eut demandé ! Je vous laisse imaginer ma tête et l’envie de poursuivre la conversation ! Heureusement, ayant raccroché, je n’eus guère le temps de m’interroger sur son cas puisqu’un second appel retentit. Encore choqué du précédent entretien, je craignais de tomber sur une autre « cinglée », mais celle-ci semblait nettement plus sérieuse. Je lui fixai donc un rendez-vous illico.

Une belle femme dans la quarantaine, très nerveuse, stressée arriva dans mon bureau comme une tornade, les cheveux en bataille. Elle dégageait une énergie à revendre. C´était incroyable ! Elle commença par se présenter avant de me lancer qu´il fallait que tout soit clair : « entre-nous, il ne devra y avoir aucune ambiguïté ! » Je rigolais car effectivement, je n´avais jamais imaginé une telle perspective. De plus, il était évident qu´une gouvernante d´expérience, je n’allais pas la chercher dans le magazine « Playboy ». Conquis par sa détermination et une classe indescriptible, au « feeling » je n´ai pas hésité une seconde, c´était elle !

C´était bien elle, un phénomène, la perle rare tant recherchée : Mireille Griffon, « Mimi » pour les intimes. Une femme exceptionnelle qui m’offrit un service princier, avec laquelle je pris des habitudes régaliennes avec moult courtisans autour de moi. J’allais vivre un véritable conte de fées, une aventure irréelle. J’ignorais alors que ma nouvelle gouvernante cachait de lourds secrets qui ne me seront dévoilés que plusieurs mois plus tard.

Ce premier août de l’année 86, jour de la fête nationale en Suisse, Loulou, mon complice et confident, me proposa de venir manger chez lui avec Mimi. J’avais accepté avec plaisir, car chez Loulou se trouvait Corinne, son épouse qui était un véritable « cordon-bleu » : on y mangeait toujours très bien et on rigolait beaucoup. Nous étions donc sur sa terrasse avec une bonne bouteille de vin blanc bien fraîche et le cigare au bec.

Il faisait beau et j’étais très à l´aise lorsque Loulou me déclara que Mimi avait quelque chose d’important à me dire. Je vis alors ma gouvernante, habillée comme une reine, éclater en sanglot :

–   Monsieur, Monsieur, il faut que je vous dise…

–   Allez-y Mimi, je vous écoute !

–   Voilà, il y a quelques années, je dirigeais une agence de mannequin…

–   Des mannequins ?

–   Oui, des filles et aussi quelques garçons…

Et elle me raconta donc son aventure que je ne mis pas beaucoup de temps à comprendre. Ainsi, six mois après son engagement, elle m’avoua avoir dirigé une agence de « mannequins » qui comprenait des femmes et à ma grande surprise, des hommes aussi ! Finalement en y repensant, elle était aussi novatrice que moi : dans son domaine elle proposa d’entrée des Escort-boys dans son service VIP habituellement exclusivement féminin. En cela, elle se démarquait de la célèbre « Madame Claude » à laquelle elle fut comparée dans les médias. Et moi, qui ne vivais que pour et par le sport sans rien connaître à ces pratiques discrètes, j’étais presque heureux de rentrer « par la fenêtre » de ce monde inconnu et clandestin alors que sans elle je n’aurais jamais osé « pousser la porte » !

Évidemment, son histoire m´épatait car comment ne pas penser que le sexe et l’argent ne feraient pas bon ménage ? Incapables de juguler les réseaux de proxénètes avec la sévérité qu’ils méritent, certains pays décrètent l’interdiction de la prostitution en sévissant contre les « clients », le plus souvent des puceaux timides, des moches, des vieux, des infirmes ou encore tous ceux qui n’ont pas eu la chance de rencontrer l’âme sœur. Ces moralisateurs publics y ont-ils pensé à tous ces exclus livrés à la solitude, aux malheureux qui se réfugient dans l’alcool, la drogue ou les médicaments ? Une telle interdiction, synonyme de privation d’humanité physique ou autres réconforts psychologiques ne risque-t-elle pas d’inciter certains – notamment les plus persécutés ou les plus fragiles – à commettre des actes aussi incontrôlables qu’irréfléchis qui peuvent même aboutir finalement à des viols, des meurtres ou des suicides ?

Comment peut-on croire qu’un être humain qui se prostitue affiche nécessairement un comportement différent de nos semblables ? Est-ce un hors-la-loi, une espèce d’extraterrestre qui verrait le monde à travers un miroir déformant ? En réalité, on trouve différentes histoires et explications chez ceux qui choisissent ce moyen pour améliorer leur situation. Pourquoi penser que seule la fille – ou le garçon – du voisin pourrait céder à une telle opportunité ? Le sexe est omniprésent dans notre société puisqu’il est un élément incontournable du pouvoir. De fait il est partout, au bureau, à votre domicile, que ce soit auprès d’un mari pour sa pitance quotidienne, auprès d’un patron pour une gratification ou une promotion sociale, ou simplement pour le plaisir de s’offrir une gâterie.

Finalement, la promotion canapé est humaine et existe depuis la nuit des temps, et elle s’apparente à de la prostitution quoi qu’on en pense. Mimi fera lors de son arrestation la une des journaux français les plus médiatisés et elle occupera une vingtaine de pages dans le livre consacré à l´homme le plus riche du monde. Bref, je me retrouvais dans un polar, un vrai polar. Je n´en revenais pas de pénétrer dans les arcanes des milliardaires les plus fous de la planète, car la clientèle de Mimi dépassait largement la Côte d’Azur ou le sol saoudien !

Imaginez, un grand naïf comme moi qui se retrouve malgré lui dans une telle histoire ! Cette rencontre peu banale entre mon atypisme et une femme, certes maquerelle de luxe mais exceptionnelle, vaut vraiment le coup d´être racontée. Un homme solitaire qui se retrouve subitement dans l’univers de l’argent et une femme au train de vie misérable qui finit par côtoyer les hommes les plus importants de ce bas monde : Deux destinées pour une histoire, il y a de quoi se divertir, non ?

Mimi craignait ma réaction alors que secrètement je me régalais de me retrouver sur cette galère ! Je n’allais bien évidemment pas prendre des mesures autoritaires à son égard, mais au contraire lui donner une chance de se réinsérer, d’autant plus que j’étais « aux anges » de ses services depuis son engagement. Et cela allait durer plusieurs années pendant lesquelles je me suis imaginé au « Palais de mille et une nuits ».

 En prison, Mimi avait donc rédigé ses mémoires qui lui valurent d’être harcelée par ses commanditaires jusqu’à la fin de sa vie. Lorsque nos relations devinrent amicales, nous développâmes ses écrits qui aboutirent à un roman biographique : « Du cash au clash : Escort girls, Escort Boys, l’envers du décor ». Une publication qui ne fut achevée que très récemment par mon désir de rendre hommage à cette rencontre exceptionnelle entre deux personnages aux aspirations complètement opposées.

 À sa sortie de prison, Mimi avait dû réapprendre à vivre normalement, attendant en vain des nouvelles de Samir son ex-associé qui lui avait pourtant promis deux millions de francs français à sa sortie pour qu’elle assume seule les charges de sa condamnation. Elle respecta ce pacte en ne dénonçant personne et récolta trois ans d’emprisonnement. Elle fera une année et demie de prison ferme avec une interdiction de séjour dans le sud de la France. Ce qui l’amènera en Suisse, chez moi !

Samir ne se manifesta que trois mois après sa libération. Ils se retrouvèrent à « la Voile d’Or » un lieu que tous les deux connaissaient bien. Il se montra comme à son habitude courtois et désolé de tout ce qui lui était arrivé. N’écoutant que ce qu’il désirait entendre, jurant les grands dieux que c’était totalement injuste et, « grand seigneur », il lui offrit un peu d’argent pour qu’elle puisse se refaire une santé sous de meilleurs auspices. Mimi lui rappela alors sa promesse passée en lui précisant qu’elle en attendait beaucoup plus, précisant que son offre allait faire sourire son percepteur : « Rassurez-vous, je suis là. Tout va s’arranger pour vous. L’important, maintenant, c’est que vous partiez. Je vous ferai parvenir de l’argent tous les mois par l’intermédiaire de mon avocat. Je m’occupe du reste. ».

C’était justement ce « reste » qui inquiétait Mimi : « Chat échaudé craint l’eau froide ». Sa réaction fut terrible : « Tous les mois ? Comment ça tous les mois ? Croyez-vous que je souhaite passer ma vie à dépendre de votre bon vouloir ? Je veux ce qui m’est dû. J’ai tout perdu à cause de vous ! ». Dans la foulée, elle l’informa qu’elle avait pris soin d’écrire ses mémoires en prison et que si elle ne recevait pas son dû, elle vendrait ce manuscrit. Semblant ignorer cette menace, Samir continua à se montrer gentil : « Je ne pense qu’à votre avenir. Reprenez-vous, tout s’arrangera, j’y veillerai personnellement. Quant à votre ouvrage, il ne peut être qu’une source d’ennuis pour vous ! ».

Les faits délictueux qu’elle avait consigné dans son manuscrit impliquaient cet ex-associé peu enclin à se laisser déshonorer. Celui-ci était habitué à utiliser les méthodes coercitives les plus extrêmes dès lors qu’il se sentait menacé. Mimi en avait fait les frais lorsqu’elle fut laissée pour morte complètement défigurée dans un parking souterrain quelques mois avant son incarcération.

Dépassée par ses dettes et se trouvant dans l’impossibilité de travailler puisque interdite de séjour, Mimi dut se résoudre à partir sous d’autres cieux espérant retrouver l’occasion de se refaire une santé et échapper à la traque de ceux qui craignaient l’édition de son témoignage. D’ailleurs, pendant qu’elle travaillait pour moi, elle me disait souvent qu’elle se sentait suivie et m’avait d’ailleurs remis un testament olographe où elle nommait les responsables si elle venait à disparaître ou à mourir.

Un jour, elle m’avait demandé de l’accompagner à l´Hôtel Richemond de Genève où Samir louait une suite à l’année. Il lui avait fixé rendez-vous « pour régler quelques détails » et elle n´osait pas y aller seule. La situation était cocasse, nous étions l’un et l’autre d’un côté du bar faisant semblant de ne pas nous connaître. Elle lisait un journal et moi le mien, on se serait cru au cinéma ! Personnellement, je me réjouissais de le voir cet associé véreux. Eh bien ce fut raté ! À 1000 heures pile, un de ses gorilles est venu la chercher pour l´accompagner dans la chambre de ce personnage sulfureux. Je ne le connaîtrais donc jamais ce bonhomme. Il ne me restera que les images de la TV où il faisait la « Une » des actualités à la suite d’un délit d´initié qui fut l´un des plus gros scandales de « la Vème République » impliquant le gouvernement et même le Président François Mitterrand par le biais de son gérant de fortune avec lequel il s’était lié d’amitié lorsqu’ils étaient prisonniers de guerre.

Samir sera incarcéré pour ce délit, alors que d’autres, tout aussi responsables, furent acquittés. Lorsque Mimi ressorti de l’ascenseur pour me rejoindre, elle était furieuse : « Il m´offre un manteau de fourrure… » et 10´000 CHF pour qu´elle se tienne tranquille. Elle lui a tout jeté à la figure en lui réclamant les 2 millions de francs français promis en échange de son silence

Pour Mimi, il lui était insupportable d’entendre les multiples accusations d’un bon nombre de personnes qui ne voyaient en elle qu’une « banale maquerelle ». C’était Samir son commanditaire qui s’était imposé à elle comme associé lorsqu’il était encore le secrétaire particulier d’Adam Khashoggi, l’homme le plus riche du monde de l’époque. C’est lui qui fournissait des « filles » à profusion à son patron avant que Mimi – qui s’ennuyait de sa fonction de gouvernante d’un couple fortuné à Monaco – n’ait manifesté ouvertement son intention d’ouvrir une « agence de mannequins de luxe » aptes à accompagner et distraire les riches contribuables ou autres hommes d’affaires en congrès à Monaco. Mimi pensait naïvement pouvoir contrôler et protéger celles et ceux qui lui feraient confiance, mais rapidement elle prit conscience de la réalité des choses et de l’ampleur de sa tâche.

Samir avait vite compris que cette concurrence pouvait nuire à sa propre activité et il lui proposa donc une association au sein de laquelle il serait son homme de confiance. Outre l’ouverture de son « carnet d’adresses », il lui promit de la protéger, elle et sa structure. En contrepartie leurs revenus seraient partagés. Consciente que seule elle ne ferait pas le poids et trouvant Samir sympathique, Mimi accepta. D’entrée, son premier client sera Adam Khashoggi qui s’entourait en moyenne d’une douzaine de filles par jour. En pactisant avec le « Diable », il ne lui faudra que quelques mois pour constater que du « Paradis à l’enfer », il n’y avait qu’une porte à franchir !

 Après avoir constaté que Samir n’était qu’un personnage cupide et cruel alors qu’elle cherchait, depuis sa sortie de prison, à se faire la plus discrète possible, les ragots les plus fous courraient sur son compte. On racontait même qu’elle était partie pour l’Italie afin de constituer un nouveau réseau de prostitution ou bien que couverte de dollars elle avait décidé de prendre une retraite paisible sur une île à l’autre bout du monde. En écoutant ses récits, pour ma part, il me semblait revivre ce qu’on colportait à mon égard lorsque j’étais médiatisé : des on-dit colportés par une presse malveillante et repris par des gens que j’avais soutenus, souvent aidés et enrichis, ou encore par de parfaits inconnus qui ne me connaissaient pas ! C’est intrigant de partager de telles similitudes en de telles circonstances avec une personne qu’on a engagée en toute confiance sans rien connaître de son passé ! »

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ÉPILOGUE

« Mbappé et ses potes » face au chaos planétaires

« Fraîchement titré champion du monde de football avec l’équipe de France, Kylian Mbappé alors âgé de 19 ans faisait la couverture du célèbre hebdomadaire américain « Time » comme personnalité de l’année 2018. À 24 ans, en avril 2023, le jeune prodige français continue son ascension en figurant cette fois-ci parmi les 100 personnalités les plus influentes de la planète dans la catégorie « innovateurs ». Son portrait, rédigé par Vivienne Walt – la correspondante du « Time » à Paris – décrit le capitaine de football français comme « un homme qui n’est pas du genre à cacher ses émotions » en illustrant son influence au sein de la société française par l’attention particulière que lui porte Emmanuel Macron, le président de la République qui s’était « accroupi à côté de lui » après la défaite en finale de la Coupe du monde 2022. « Emmanuel Macron sait que Mbappé représente beaucoup plus qu’un simple génie du football » ajoute notamment le média américain à propos du triple buteur de la dernière finale du Mondial.

Une distinction médiatique qui constitue une avancée considérable pour ce champion dont l’influence personnelle dépasse déjà largement celle qu’il a dans le sport. Reconnu avant le Mondial 2022 comme le meilleur footballeur planétaire et ceci sans avoir recours à un quelconque trophée spécifique accordé de manière quelque peu aléatoire : un ballon doré en l’occurrence qui est avant tout lié aux résultats de son équipe plutôt qu’aux seules capacités du joueur, ce jeune « HPI » – Haut Potentiel Intellectuel – magistral prouve jours après jours qu’il a indiscutablement les qualités requises pour être un influenceur planétaire décisif.

Dès lors, Kylian – entouré d’autres personnalités fortunées du même acabit – se doit de prendre à bras-le-corps la défense des droits humains car tout nous démontre aujourd’hui que les politiques n’y arriveront pas seuls. En effet, le chaos s’amplifie et rend la gouvernance du monde ingérable. Les démocraties qui se réduisent comme peau de chagrin ont besoin de ces « Méga stars ultramédiatisées » pour sauver ce qu’il reste de nos libertés si durement acquises. »

POST-SCRIPTUM

Mbappé, mon Messie

« Lorsque je découvris le football, à 10 ans, mon idole fut Kopa que je découvris lors de la coupe du monde 1958. Je ne vivais qu’à travers lui. Mon talent de footballeur me permit d’hériter de son surnom.

Mon Roi fut Pelé qui détrôna Di Stefano et Kopa après que j’eus décidé spontanément de consacrer ma vie au football. Deux idoles que j’ai eu l’honneur de rencontrer.

Porteur du syndrome d’Asperger sans le savoir, puisqu’alors non-enseigné aux psychiatres eux-mêmes, mes caractéristiques obsessionnelles pour ce sport firent que je fus, par la force des choses, un innovateur permanent qui me permit d’atteindre l’objectif de « vivre par le football » de manière éclatante sur le plan local, puis national.

À l’époque on voyait Pelé une ou deux fois par année à la TV, quand il venait en Europe avec son équipe se Santos ou, plus rarement avec la « Seleção ». Ou encore, aux actualités au cinéma. Les militaires, alors au pouvoir au Brésil, lui interdisaient d’être transféré alors qu’il croulait sous les offres. Kopa, lui, on le voyait lors des rares matches du Stade de Reims de coupe d’Europe retransmis à la TV ou lorsque l’équipe de France jouait. Et à l’époque où il jouait au Real-Madrid, il ne jouait pas vu que le club espagnol ne le libérait pas. Bref, c’était l’époque où il fallait vraiment s’intéresser au football pour pouvoir suivre concrètement les joueurs qu’on idolâtrait.

Le football – qui à l’époque, était quasiment le seul loisir pour un jeune garçon – on le pratiquait trois-quatre heures par jour sans discontinuer entre deux parties de « cow-boys et indiens » et le feuilleton télévisé « Rintintin » qui passait tous les mercredis après-midi à 17 heures qu’on allait voir devant une des télévisions du quartier lorsqu’on était invité, ce qui était rare dans mon cas.

Comme le football n’était alors qu’une occupation semi-professionnelle et que ma réussite peuplait les « paysages champêtres suisses », il est clair qu’une médiatisation hors du pays de mon activité était utopique. L’information mettait des jours à circuler au point que les images de la guerre d’Algérie à la TV – l’évènement de l’époque – n’arrivaient que plusieurs jours après les faits. On était loin des « chaînes d’information continues d’aujourd’hui » qui empêchent les gens de réfléchir et nourrissent les « fake news ».

Issue des « trente glorieuses » ma vie fut donc un rêve permanent, certes entrecoupée de réveils brutaux sans lesquels elle n’aurait eu aucun intérêt. Il faut être conscient qu’il n’existe pas d’histoire merveilleuse sans accrocs hors des « contes de fées » qui ne sont là que pour endormir les enfants.

Et c’est aux termes de cette existence riche en événements qu’apparut Mbappé : un extraterrestre ! Son apparition fut si soudaine et spectaculaire qu’il fallut peu de temps au « spécialiste » que j’étais pour m’apercevoir qu’il « traçait le Roi Pelé à plein tube ».

Et plus je le voyais, plus il me passionnait, plus je le suivais et plus je m’apercevais que sa passion comportementale me rappelait celle que j’avais, à son âge, 50 ans auparavant. J’étais un Aspie et lui, un HPI aux capacités communicatives exceptionnelles. Un futur influenceur majeur, soit beaucoup plus qu’un simple footballeur. En fait, pour simplifier, j’étais une sorte de prophète d’un Messie qui s’appelle finalement Mbappé.

Au crépuscule de ma vie, après avoir suivi « pas à pas » l’itinéraire de Pelé, je prenais conscience que j’allais m’éteindre en suivant celui de Mbappé qui, je l’espère du fond du cœur, atténuera le crépuscule d’un monde qui a fondamentalement besoin de nombreux guides fondamentaux, dont les plus grandes stars médiatisées sont des éléments essentiels afin d’atténuer les épreuves qu’il va devoir affronter.

Après avoir suivi Kopa qui fut, l’un des premiers footballeurs – avec son ami Just Fontaine – de prendre la défense des footballeurs à une époque où ils n’avaient vraiment aucun droit face à des clubs et des fédérations toutes puissantes, je me suis efforcé de suivre son inspiration en défendant les miens.

Les footballeurs étant devenus aujourd’hui maîtres de leur destin, ce sont les droits humains qui m’interpellent. Ils sont aujourd’hui bafoués de manière insupportable et c’est ceux-ci qu’il faut défendre. Avec le soutien de mon cercle d’amis, c’est notre objectif avéré. Il est évident que l’efficacité de notre volonté ne peut être notable qu’en cohabitant avec toutes les OGN qui partagent nos convictions. Et parmi celles-ci, j’espère de tout mon cœur, que « mon Messie » s’associe à notre combat en étant l’un des leaders de tous ses potes richissimes qui devraient prendre la tête de ce mouvement. »

ET AU MILIEU DE CET ITINÉRAIRE ÉPOUSTOUFLANT, LA RENCONTRE IMPROBABLE MAIS BIEN RÉELLE DE LA « MADAME CLAUDE DE LA CÔTE », UNE REINE DU SEXE QUI SORT DE PRISON !

Du « Cash au clash » de Frédéric Chris

Dans les années 80, gérante d’une société d’escorting, Mimi fut la reine des plaisirs de la Côte d’Azur. Inspiré de l’autobiographie rédigée alors qu’elle purgeait sa peine de prison, « Du Cash au Clash » décrit un monde fastueux au sein duquel Mimi réalisait les fantasmes des personnages les plus influents de l’époque.

Ce roman détaille avec réalisme les pérégrinations sexuelles les plus extravagantes de sa clientèle richissime, mais aussi les horreurs qu’elle et son petit ami ont vécues en prison.

Outre des hôtesses hors-normes de haut de gamme, Mimi employa aussi bon nombre d’escort-boys très prisés par une richissime clientèle avide de plaisirs non-conventionnels qui, le plus souvent, n’hésitait pas à mélanger les genres. Ce roman – sans tabou et très réaliste, basé sur des faits vécus – est destiné à un public averti.

Dans ce monde inquiétant, régi par l’argent et le pouvoir, Mimi était devenue gênante au point qu’à sa libération, harcelée, menacée de mort, elle aurait finalement choisi de se suicider dans des circonstances qui n’ont jamais été élucidées.

« Du Cash au Clash » brosse le portrait intime d’un personnage scandaleux mais attachant. Un roman passionnant dont l’univers sulfureux vous fascinera !

Avant de devenir artiste, Frédéric Chris, alias Christian Imbach, révolutionnera par ses innovations un milieu du football trivial et homophobe qui s’étiolait dans ses convenances. Entraîneur formateur à succès, il sera à 27 ans entraîneur de ligue nationale et du coup, le premier Suisse exerçant cette fonction professionnellement. C’était en 1975. Parallèlement à ces activités sportives, chroniqueur pour le bi-hebdomadaire « La Semaine Sportive », que le fondateur de la « Frédéric Chris Fondation » rencontrera les plus grandes stars du 20ème siècle parmi lesquelles Pelé, Di Stefano, Suarez, Mazzola, Helenio Herrera et de nombreuses autres. Sollicité par le talentueux joueur suisse Lucien Favre en 1979, il se révélera aussi le précurseur du management en Suisse. Ses succès et – surtout une franchise sans limite – lui vaudront un harcèlement médiatique pendant une quinzaine d’années avant que les circonstances ne le fassent changer d’orientation, le projetant dans une saga improbable au milieu de laquelle la plus célèbre entremetteuse de France – qui venait de sortir de prison – se trouvera mêlée. À 62 ans, il découvre par hasard qu’il est porteur du syndrome d’Asperger. Une révélation qui lui ouvre les yeux sur ses erreurs de communications et l’impopularité qui s’ensuivit ! Ayant toute sa vie passé pour un « fou certes génial mais quand même cinglé », il comprit enfin que son comportement irrationnel était dû à ses pathologies autistiques. Sans celle-ci toutefois, il n’aurait jamais franchi des barrières face auxquelles le simple bon sens aurait reculé. Cette biographie prouve qu’être « différent » – Asperger dans son cas – est source d’innovation et de détermination sans lesquelles les succès sont sans originalité donc peu progressifs !

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